Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome2.djvu/444

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humeurs de quoi infecter une province : vous autres marins, vous avez de si vilaines maladies !

M. DU CAP-VERT.

Parlez pour vous, messieurs du continent : les gens de mer sont des gens propres ; mais vous !…

LA PRÉSIDENTE.

Je vous en quitterai pour cinquante pilules.

M. DU CAP-VERT.

J’aimerais mieux épouser la fille d’un Cafre, ma bonne femme : je romprai plutôt le marché.

LE CHEVALIER, en lui faisant une grande révérence.

Souffrez que je vous dise, par l’intérêt que je prends à ce mariage…

M. DU CAP-VERT, de même.

Eh ! quel intérêt prenez-vous, s’il vous plaît, à ce mariage ?

LE CHEVALIER.

Je vous conseille de ne rien précipiter, et de suivre l’avis de madame : j’ai des raisons importantes pour cela, j’ose vous le dire.

M. DU CAP-VERT.

L’équipage de ce bâtiment-ci est composé d’étranges gens, j’ose vous le dire : un fat me refuse la porte, un doucereux me fait des révérences et me donne des conseils sans me connaître ; l’un me parle de ma nativité, l’autre veut qu’on me purge. Je n’ai jamais vu de vaisseau si mal frété que cette maison-ci.

LE PRÉSIDENT.

Oh çà ! puisque vous voilà : nous allons préparer Fanchon à vous venir trouver.

M. DU CAP-VERT.

Allez, beau-père et belle-mère.


Scène X.

M. DU CAP-VERT, LE CHEVALIER.
LE CHEVALIER.

Monsieur, je ne me sens pas de joie de vous voir.

M. DU CAP-VERT.

Vraiment, je le crois bien que vous ne vous sentez pas de joie en me voyant : pourquoi en sentiriez-vous ? vous ne me connaissez pas.

LE CHEVALIER.

Je veux dire que ma joie est si forte…