Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome2.djvu/519

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

ACTE V, SCÈNE II. 499

Quelques-uns à graiuls rris le nouniiaient votre (’-poux ;

Les autres s’écriaient qu’il était né de vous.

Il ne pouvait, madame, en ce tiiiiniltc liorrihlc,

Éclaircir à leurs yen\- la vérit( terrible :

Il songeait à combattre, à vaincre, à vous venger :

Mais entouré des siens ([u"oii venait d’égorger.

De ses tristes snjets déplorant la misère,

Avec le nom de roi prenant un cœur de père,

Il se plaignait aux dieux que le sang innocent

Sonillait le premier jour de son règne naissant.

Il s’avance aussitôt ; ses mains ensanglantées

Montrent de l’olivier les branches respectées.

Ce signal de la paix étonne les mutins,

Et leurs traits suspendus s’arrêtent dans leurs mains.

« Amis, leur a-t-il dit, Argos et nos provinces

Ont gémi trop longtemps des fautes de leurs princes ;

Sauvons le sang du peuple, et qu’Hermogide et moi

Attendent de ses mains le grand titre de roi.

Voyons qui de nous deux est plus digne de l’être.

Oui, peuple, en quelque rang que le ciel m’ait fait naître.

Mon cœur est au-dessus, et ce cœur aujourd’hui

Ne veiU qu’une vengeance aussi noble que lui.

Pour le traître et pour moi choisissez une escorte

Qui du temple d’Argos environne la porte.

Et toi, viens, suis mes pas sur ce tombeau sacré,

Sur la cendre d’un roi par tes mains massacré.

Combattons devant lui, que son ombre y décide

Du sort de son vengeur et de son parricide. »

Ah ! madame, à ces mots ce monstre s’est troublé : Pour la première fois Hermogide a tremblé. Bientôt il se ranime, et cette âme si fière Dans ses yeux indignés reparaît tout entière. Et bravant à la fois le ciel et les remords : « Va, dit-il, je ne crains ni les dieux ni les morts, Encor moins ton audace ; et je vais te l’apprendre Au pied de ce tombeau qui n’attend que ta cendre. »

Il dit : un nombre égal de chefs et de soldats Vers ce tombeau funeste accompagne leurs pas ; Et moi des justes dieux conjurant la colère. Je viens joindre mes vœux aux larmes d’une mère. Puisse le ciel vengeur être encor le soutien De votre auguste fils, qui fut longtemps le mien !