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SUPERSTITION.

de Dieu mon père ; vous serez réduits à un tel état que vous n’aurez connaissance des uns des autres. Ouvrez les yeux et contemplez ma croix, que je vous ai laissée pour arme contre l’ennemi du genre humain, et pour vous servir de guide à la gloire éternelle ; regardez mon chef couronné d’épines, mes pieds et mes mains percés de clous : j’ai répandu jusqu’à la dernière goutte de mon sang pour votre rédemption, par un pur amour de père pour des enfants ingrats. Faites des œuvres qui puissent vous attirer ma miséricorde ; ne jurez pas mon saint nom ; priez-moi dévotement ; jeûnez souvent ; et particulièrement faites l’aumône aux pauvres, qui sont mes membres : car c’est de toutes les bonnes œuvres celle qui m’est la plus agréable ; ne méprisez ni la veuve ni l’orphelin ; restituez ce qui ne vous appartient pas ; fuyez toutes les occasions de pécher ; gardez soigneusement mes commandements ; honorez Marie, ma très-chère mère.

« Ceux ou celles qui ne profiteront pas des avertissements que je leur donne, qui ne croiront pas mes paroles, attireront par leur obstination mon bras vengeur sur leurs têtes ; ils seront accablés de malheurs, qui seront les avant-coureurs de leur fin dernière et malheureuse, après laquelle ils seront précipités dans les flammes éternelles, où ils souffriront des peines sans fin, qui sont le juste châtiment réservé à leurs crimes.

« Au contraire, ceux ou celles qui feront un saint usage des avertissements de Dieu, qui leur sont donnés par cette lettre, apaiseront sa colère, et obtiendront de lui, après une confession sincère de leurs fautes, la rémission de leurs péchés, tant grands soient-ils. »

Il faut garder soigneusement cette lettre, en l’honneur de notre Seigneur Jésus-Christ.

Avec permission. À Bourges, le 30 juillet 1771. De Beauvoir, lieutenant général de police[1].

N. B. Il faut remarquer que cette sottise a été imprimée à Bourges, sans qu’il y ait eu ni à Tréguier ni à Paimpole le moindre prétexte qui pût donner lieu à une pareille imposture. Cependant supposons que dans les siècles à venir quelque cuistre à miracle veuille prouver un point de théologie par l’apparition de Jésus-Christ sur l’autel de Paimpole, ne se croira-t-il pas en droit de citer la propre lettre de Jésus, imprimée à Bourges avec permission ? Ne traitera-t-il pas d’impies ceux qui en douteront ?

  1. Fin de l’article en 1771 ; le N. B. est de 1774. (B.)