qu’elle existe. N’allons donc point d’abord imaginer des causes et faire des hypothèses : c’est le sûr moyen de s’égarer ; suivons pas à pas ce qui se passe réellement dans la nature. Nous sommes des voyageurs arrivés à l’embouchure d’un fleuve : il faut le remonter avant que d’imaginer où est sa source.
Galilée, le restaurateur de la raison en Italie, découvrit cette importante proposition, que les corps graves qui descendent sur la terre (faisant abstraction de la petite résistance de l’air) ont un mouvement accéléré dans une proportion dont je vais tacher de donner une idée nette. Un corps abandonné à lui-même du haut d’une tour parcourt, dans la première seconde de temps, un espace qui s’est trouvé être de 15 pieds de Paris, selon les découvertes d’Huygens, inventeur en mathématiques. On croyait, avant Galilée, que ce corps, pendant deux secondes, aurait parcouru seulement deux fois le même espace, et qu’ainsi il ferait 150 pieds en dix secondes, et 900 pieds en une minute : c’était là l’opinion générale, et même fort vraisemblable à qui n’examine pas de près ; cependant il est vrai qu’en une minute ce corps aurait fait un chemin de 54,000 pieds, et 216,000 pieds en deux minutes.
Voici comment ce progrès, qui étonne d’abord l’imagination, s’opère nécessairement et avec simplicité. Un corps est précipité par son propre poids : cette force quelconque qui l’anime à descendre de 15 pieds dans la première seconde agit également à tous les instants, car, rien n’ayant changé, il faut qu’elle soit toujours la même : ainsi, à la deuxième seconde, le corps aura la force qu’il a acquise à chaque instant de la première seconde, et la force qu’il éprouve chaque instant de la deuxième. Or, par la force qui l’animait à la première seconde, il parcourait 15 pieds ; il a donc encore cette force quand il descend la deuxième seconde. Il a, outre cela, la force de 15 autres pieds qu’il acquérait à mesure qu’il descendait dans cette première seconde : cela