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TROISIÈME PARTIE. — CHAPITRE VIII.

la terre, l’ordre du monde ne serait pas tel qu’il est : car les révolutions des planètes et leurs distances à leur centre dépendent de leur gravitation, et leur gravitation dépend en raison directe de la quantité de la matière du globe où est leur centre ; donc, si le soleil surpassait à un tel excès notre terre et notre lune en matière solide, ces planètes seraient beaucoup plus attirées, et leurs ellipses très-dérangées.

En second lieu, la matière du soleil ne peut être comme sa grosseur ; car, ce globe étant tout en feu, la raréfaction est nécessairement fort grande, et la matière est d’autant moindre que la raréfaction est plus forte.

Par les lois de la gravitation, il paraît que le soleil n’a que 250,000 fois plus de matière que la terre ; or, le soleil, un million plus gros, n’étant que le quart d’un million plus matériel, la terre, un million de fois plus petite, aura donc à proportion quatre fois plus de matière que le soleil, et sera quatre fois plus dense.

Le même corps, en ce cas, qui pèse sur la surface de la terre comme une livre pèserait sur la surface du soleil comme 35 livres ; mais cette proportion est de 24 à l’unité, parce que la terre n’est pas en effet quatre fois plus dense, et que le diamètre du soleil est ici supposé être cent fois celui de la terre.

Le même corps qui tombe ici de 15 pieds dans la première seconde, tombera d’environ 415 pieds sur la surface du soleil, toutes choses d’ailleurs égales[1].

Le soleil perd toujours, selon Newton, un peu de sa substance, et serait dans la suite des siècles réduit à rien, si les comètes qui tombent de temps en temps dans sa sphère ne servaient à réparer ses pertes : car tout s’altère et tout se répare dans l’univers.

MERCURE.

Depuis le soleil jusqu’à onze ou douze millions de nos lieues, ou environ, il ne paraît aucun globe[2].

À onze ou douze millions de nos lieues du soleil est Mercure dans sa moyenne distance. C’est la plus excentrique de toutes les

  1. Ces déterminations sont celles que l’on trouve dans les Principes mathématiques. Des observations plus exactes ont appris depuis qu’il fallait faire quelques changements dans les éléments adoptés par Newton, et par conséquent dans ces différents résultats. (K.)
  2. En 1859, on annonça la découverte d’une planète nouvelle plus rapprochée du soleil que Mercure. (D.)