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TROISIÈME PARTIE. — CHAPITRE XIV.

nomènes célestes et par ceux de la mer ; mais je n’en ai nulle part assigné la cause. Cette force vient d’un pouvoir qui pénètre au centre du soleil et des planètes sans rien perdre de son activité, et qui agit, non pas selon la quantité des superficies des particules de matière, comme font les causes mécaniques, mais selon la quantité de matière solide ; et son action s’étend à des distances immenses, diminuant toujours exactement selon le carré des distances, etc. »

C’est dire bien nettement, bien expressément, que l’attraction est un principe qui n’est point mécanique.

Et quelques lignes après, il dit : « Je ne fais point d’hypothèses, hypotheses non fingo. Car ce qui ne se déduit point des phénomènes est une hypothèse ; et les hypothèses, soit métaphysiques, soit physiques, soit des suppositions de qualités occultes, soit des suppositions de mécanique, n’ont point lieu dans la philosophie expérimentale. »

Je ne dis pas que ce principe de la gravitation soit le seul ressort de la physique ; il y a probablement bien d’autres secrets que nous n’avons point arrachés à la nature, et qui conspirent avec la gravitation à entretenir l’ordre de l’univers.

La gravitation, par exemple, ne rend raison ni de la rotation des planètes sur leurs propres centres, ni de la détermination de leurs orbes en un sens plutôt qu’en un autre, ni des effets surprenants de l’élasticité, de l’électricité, du magnétisme. Il viendra un temps, peut-être, où l’on aura un amas assez grand d’expériences pour reconnaître quelques autres principes cachés. Tout nous avertit que la matière a beaucoup plus de propriétés que nous n’en connaissons. Nous ne sommes encore qu’au bord d’un océan immense : que de choses restent à découvrir ! mais aussi que de choses sont à jamais hors de la sphère de nos connaissances !

FIN DES ÉLÉMENTS DE LA PHILOSOPHIE DE NEWTON.