Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome23.djvu/578

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
568
HISTOIRE

4° Le candidat se trompe quand il dit que l’étendue n’est qu’une perception[1] de notre âme. S’il fait jamais de bonnes études, il verra que l’étendue n’est pas comme le son et les couleurs, qui n’existent que dans nos sensations, comme le sait tout écolier.

5° À l’égard de la nation allemande, qu’il vilipende[2] et qu’il traite d’imbécile en termes équivalents, cela nous paraît ingrat et injuste : ce n’est pas tout de se tromper, il faut être poli ; il se peut faire que le candidat ait crut inventer quelque chose après Leibnitz, mais nous dirons à ce jeune homme que ce n’est pas lui qui a inventé la poudre.

6° Nous craignons que l’auteur n’inspire à ses camarades quelques petites tentations de chercher la pierre philosophale[3] : « car, dit-il, sous quelque aspect qu’on la considère, on ne peut en prouver l’impossibilité ». Il est vrai qu’il avoue qu’il y a de la folie à employer son bien à la chercher ; mais comme, en parlant de la somme du bonheur, il dit qu’on ne peut démontrer la religion chrétienne, et que cependant bien des gens la suivent, il se pourrait, à plus forte raison, que quelques personnes se ruinassent à la recherche du grand œuvre, puisqu’il est possible, selon lui, de le trouver.

7° Nous passons plusieurs choses qui fatigueraient la patience du lecteur et l’intelligence de M. l’inquisiteur ; mais nous croyons qu’il sera fort surpris d’apprendre que le jeune étudiant[4] veuille absolument disséquer des cerveaux de géants hauts de douze pieds, et des hommes velus portant queue, pour sonder la nature de l’intelligence humaine ; qu’avec de l’opium et des rêves il modifie l’âme ; qu’il fasse naître des anguilles grosses d’autres anguilles, avec de la farine délayée, et des poissons avec des grains de blé[5]. Nous prenons cette occasion de divertir M. l’inquisiteur.

8° Mais M. l’inquisiteur ne rira plus quand il verra que tout le monde peut devenir prophète : car l’auteur ne trouve pas plus de difficulté à voir l’avenir que le passé. Il avoue[6] que les raisons en faveur de l’astrologie judiciaire sont aussi fortes que les raisons contre elle. Ensuite il assure[7] que les perceptions du passé, du présent et de l’avenir, ne diffèrent[8] que par le degré d’activité de l’âme. Il espère qu’un peu plus de chaleur et d’exaltation dans

  1. Page 15. (Note de Voltaire.)
  2. Pages 50 et 52. (id.)
  3. Page 85. (id.)
  4. Pages 232 et 233. (id.)
  5. Page 143. (Note de Voltaire.)
  6. Page 147. (id.)
  7. Page 151. (id.)
  8. Page 154. (id.)