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SUR UN OUVRAGE DE PHYSIQUE.

exact ni moins vrai. Tout le physique du feu reste le même. Toutes ses propriétés subsistent, et je ne connais d’erreurs capitales en physique que celles qui vous donnent une fausse économie de la nature. Or qu’importe que la lumière soit un être à part, ou un être semblable à la matière, pourvu qu’on démontre que c’est un élément doué de propriétés qui n’appartiennent qu’à lui ? C’est par là qu’il faut considérer cette dissertation : elle serait très-estimable si elle était de la main d’un philosophe uniquement occupé de ces recherches ; mais qu’une dame, attachée d’ailleurs à des soins domestiques, au gouvernement d’une famille, et à beaucoup d’affaires, ait composé un tel ouvrage, je ne sais rien de si glorieux pour son sexe et pour le temps éclairé dans lequel nous vivons.

Un des plus sages philosophes de nos jours, M. l’abbé Conti[1], noble vénitien, qui a cultivé toujours la poésie et les mathématiques, ayant lu l’ouvrage de cette dame, ne put s’empêcher de faire sur-le-champ ces vers italiens, qui font également honneur et au poëte et à Mme la marquise du Châtelet :

Si d’Urania, e d’Amor questa è la figlia,
Cui del bel globo la custodia diero
L’infallibili Parche, e’l sommo impero
Sù tutta l’amorosa ampia famiglia.

Ad Amore nel volto ella somiglia,
Ad Urania nel rapido pensiero,
Chè sa d’ogn’ astro il moto, ed il sentiero,
Ed onde argentea luce abbia, o vermiglia.

Non t’inganni, mi disse il franco vate ;
Ma costei non d’Urania, e non d’Amore,
Ma da Minerva d’Apollo ebbe i natali ;

Come a Minerva, a lei furo svelate
L’opre di Giove, ed ella il genitore
Propose qual oracolo a’ mortali.

FIN DU MÉMOIRE SUR UN OUVRAGE DE PHYSIQUE.
  1. Antonio Schinella, dit l’abbé Conti, né en 1677, mort en 1749, avait été lié avec Newton.