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430 DIALOGUES CHRÉTIENS.

tous ceux qui examinent, qui discutent, qui approfondissent, qui raisonnent, qui écrivent, et surtout aux encyclopédistes.

Nous faisons un Journal chrétien, dans lequel, après avoir pre- mièrement critiqué leurs ouvrages, nous examinons ensuite leur conduite, que nous trouvons ordinairement vicieuse et crimi- nelle ; et lorsqu'elle nous paraît innocente, nous disons que la chose est impossible, puisqu'ils ont travaillé à V Encyclopédie. l'encyclopédiste.

Voilà un projet qui me paraît bien raisonnable, et rien assu- rément ne sera plus chrétien que cet ouvrage. Mais, dites-moi, je vous prie; ne craignez-vous point la police? Croyez -vous qu'elle tolère une entreprise de cette nature? A quel titre osez-vous son- der les cœurs et faire la confession de foi des auteurs qui vous déplaisent? Pensez-vous qu'abusant de votre caractère, et sous le prétexte trivial et spécieux de défendre la religion, que personne ne songe à attaquer, dont les fondements sont inébranlables, et qui est sous la protection des lois et du gouvernement, vous puis- siez établir une inquisition, et que l'on souffre une pareille témérité ?

LE PRÊTRE.

Une inquisition ! Ah ! s'il y en avait une en France, vous seriez un peu plus contenus, vous autres impies ! Mais je n'en désespère pas; le pape^ qui occupe si glorieusement la chaire de saint Pierre vient de se brouiller avec la cour de Portugal en protégeant les jésuites, auxquels elle voulait contester le droit de corriger les rois ; il a envoyé un visiteur apostolique en Corse sans consulter la république de Gênes, et, depuis sou arrivée dans ce pays-là, le zèle des mécontents s'est bien ranimé : tout cela me donne de grandes espérances, et si son prédécesseur- avait pensé comme lui, nous aurions la consolation de voir ce sage tribunal établi parmi nous.

Vous parlez de la police ! Ne s'est-elle pas déclarée assez hau- tement en proscrivant VÉ)icyclopcdie, ce dépôt d'hérésies et de schismes, ce recueil d'impiétés et de blasphèmes, qui respire à chaque page la révolte contre la religion et contre l'autorité ? Ne vient-elle pas en dernier lieu de permettre qu'on exposât sur le théâtre toutes les horreurs de votre morale ' ? Les conclusions du

��1. Clément XIII.

2. Benoit XIV.

3. La comédie dos Philosophes, i)ar Palissot. Voyez une note du Russe à Paris, lome X, page 124.

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