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distance que ce fût; qu'il élevait une galère du milieu de l'eau ^ et la transportait sur le rivage, en remuant le bout du doigt; qu'il en coûtait six cent mille écus pour nettoyer les égouts de Rome, etc.

Les histoires plus anciennes sont encore écrites avec moins d'attention, La saine critique y est plus négligée: le merveilleux, l'incroyable y domine ; il semble qu'on ait écrit pour des enfants plus que pour des hommes. Le siècle éclairé où nous vivons exige dans les auteurs une raison plus cultivée.

��XIV.

Lettre aux auteurs do la Gazelle UUéraire"-. (0 juin 17Gi.)

On vient d'imprimer des Mémoires pour servir à la Vie de François Pétrarque, en 2 volumes iw-h", à Amsterdam, chez Arkstée et Merkus. Si ce ne sont là que des Mémoires pour servir à la composition de cette histoire, nous devons espérer que la Vie de Pétrarque sera un ouvrage bien considérable.

11 est vrai que Pétrarque, au xiv^ siècle, était le meilleur poète de l'Europe, et même le seul ; mais il n'est pas moins vrai que de ses petits ouvrages, qui roulent presque tous sur l'amour, il n'y en a pas un qui approche des beautés de sentiment qu'on trouve répandues avec tant de profusion dans Racine et dans Quinault : j'oserais même affirmer que nous avons dans notre langue un nombre prodigieux de chansons plus délicates et plus ingénieuses

��1. C'est RoUin qui répète cela d'après Plutarque. Voltaire a rapporté le texte de Rollin, tome XIX, page 171.

2. Fréron, dans son Année littéraire, 1764, V, 49, a fait de ce morceau une critique très-vive. Voltaire en parle dans sa lettre à M. l'abbé de Sade, du 23 jan- vier 1765. (B.)

— « Je vous conjure, écrivait Voltaire à d'Argental, de recommander le plus profond secret à messieurs de la Gazette littéraire. Je ne fais pas grand cas des vers de Pétrarque ; c'est le génie le plus fécond du monde dans l'art de dire toujours la même chose, mais ce n'est pas à moi à renverser de sa niche le saint de l'abbé de Sade. » Hélas ! ce secret fut éventé par l'abbé Arnaud, qui annonça que cet article était de la main d'un grand maîti'e. Voltaire, qui n'aimait pas Pétrarque, mais qui aimait l'abbé de Sade, fut fâché de cette indiscrétion. Quant à l'abbé de Sade, il fit faire la critique des remarques voltairiennes par Fréron, qu'il glorifia dans le deuxième volume de son ouvrage, et il traita Voltaire en excom- munié. (G. A.)

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