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214 ARTICLES EXTRAITS

Il faut voir ensuite comment on peut concilier Rapin Thoiras avec l'estimable auteur qui nous donne VHistoire de France tome à tome. On trouve dans le tome XIV de cette histoire que Jeanne d'Arc était âgée de dix-sept ans quand elle fut présentée au roi, et dans Rapin Thoiras elle en a vingt-sept ^ Rapin cite en preuve le procès criminel fait à Jeanne par les évêques de France et par un évêque anglais sur la requête de la Sorhonne : ce qui peut encore faire croire qu'en effet elle avait alors vingt-sept ans, et non pas dix-sept, c'est qu'elle avoue, dans son interrogatoire, qu'elle avait eu un procès en Lorraine à l'officialité, à l'occasion d'un mariage. Elle ne dit point si c'était pour un mariage qu'on lui avait promis ou pour une cassation; mais enfin, ce n'est guère à quinze ou seize ans qu'on soutient un procès en son nom pour un mariage. Cette anecdote pourrait d'ailleurs jeter quelques soupçons sur cette fameuse virginité qui augmentait sa gloire, et dont la perte n'aurait point diminué l'éclat de sa valeur.

La nouvelle Histoire de France cite aussi le procès manuscrit de la Pucelle ; nous ne savons pas si c'est le même qui est rap- porté dans Pasquier, ou si c'est une pièce différente. Nous igno- rons lequel de ces deux manuscrits contradictoires mérite le plus de croyance, et nous attendons que l'auteur de la nouvelle His- toire éclaircisse ces difficultés avec son exactitude et son impar- tialité ordinaires, dans le volume auquel il travaille.

M. Hume, dans son Histoire, moins détaillée et moins circon- stanciée que celle de Rapin, n'entre dans aucune de ces discussions: il ne traite l'histoire qu'en philosophe. C'est assez que cette fille guerrière lui paraisse digne par son courage du rôle qu'on lui fait jouer. Tout le reste lui paraissant une supposition évidente, il lui importe peu de savoir quel était l'âge de Jeanne, et quelle fut sa conduite.

M, de Voltaire, dans son Essai sur l'Histoire générale^, s'exprime ainsi sur le supplice de cette héroïne : « Enfin , accusée d'avoir repris une fois l'habit d'homme, qu'on lui avait laissé exprès pour la tenter, ses juges, qui n'étaient pas assurément en droit de la juger, puisqu'elle était prisonnière de guerre, la déclarèrent hérétique relapse, et firent mourir par le feu celle qui, ayant sauvé sou roi,

riat-Saint-Prix; Paris, Pillet aîné, 1817, in-S". ( B.) — De nos jours, M. Qui- cherat a publié le procès de Jeanne d'Arc en six volumes.

1. Voltaire crut toujours qu'elle avait vingt-sept ans ; mais la vérité est qu'elle n'en avait que dix-sept.

2. Voyez tome XII, page 49.

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