Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome25.djvu/323

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C’est donc là celui qui ose donner des conseils à nos concitoyens (nous verrons bientôt quels conseils) ! C’est donc là celui qui parle des devoirs de la société !

Certes il ne remplit pas ces devoirs quand, dans le même libelle[1], trahissant la confiance d’un ami[2], il fait imprimer une de ses lettres pour brouiller ensemble trois pasteurs. C’est ici qu’on peut dire, avec un des premiers hommes de l’Europe, de ce même écrivain, auteur d’un roman d’éducation, que, pour élever un jeune homme, il faut commencer par avoir été bien élevé[3].

Venons à ce qui nous regarde particulièrement, à notre ville, qu’il voudrait bouleverser parce qu’il y a été repris de justice. Dans quel esprit rapporte-t-il nos troubles assoupis ? Pourquoi réveille-t-il nos anciennes querelles et nous parle-t-il de nos malheurs ? Veut-il que nous nous égorgions[4] parce qu’on a brûlé un mauvais livre à Paris et à Genève ? Quand notre liberté et nos droits seront en danger, nous les défendrons bien sans lui. Il est ridicule qu’un homme de sa sorte, qui n’est plus notre concitoyen, nous dise :

« Vous n’êtes ni des Spartiates[5], ni des Athéniens ; vous êtes

    pris soin de mon enfance. Cette maladie est connue de MM. Malouin, Morand, Thierry, Daran, le frère Côme. S’il s’y trouve la moindre marque de débauche, je les prie de me confondre et de me faire honte de ma devise. La personne sage et généralement estimée qui me soigne dans mes maux et me console dans mes afflictions n’est malheureuse que parce qu’elle partage le sort d’un homme fort malheureux ; sa mère est actuellement pleine de vie et en bonne santé malgré sa vieillesse. Je n’ai jamais exposé ni fait exposer aucun enfant à la porte d’aucun hôpital ni ailleurs.


    Une personne qui aurait eu la charité dont on parle aurait eu celle d’en garder le secret, et chacun sent que ce n’est pas de Genève, où je n’ai point vécu, et d’où tant d’animosité se répand contre moi, qu’on doit attendre des informations fidèles sur ma conduite. Je n’ajouterai rien sur ce passage, sinon qu’au meurtre près j’aimerais mieux avoir fait ce dont son auteur m’accuse que d’en avoir écrit un pareil. (J.-J. R.)

  1. Note de la troisième lettre, page 129.
  2. Je crois devoir avertir le public que le théologien qui a écrit la lettre dont j’ai donné un extrait n’est ni ne fut jamais mon ami ; que je ne l’ai vu qu’une fois en ma vie, et qu’il n’a pas la moindre chose à démêler ni en bien ni en mal avec les ministres de Genève. Cet avertissement m’a paru nécessaire pour prévenir les téméraires applications. (J.-J. R.)
  3. Tout le monde accordera, je pense, à l’auteur de cette pièce, que lui et moi n’avons pas plus eu la même éducation que nous n’avons la même religion. (J.-J. R.)
  4. On peut voir dans ma conduite les douloureux sacrifices que j’ai faits pour ne pas troubler la paix de ma patrie ; et, dans mon ouvrage, avec quelle force j’exhorte les citoyens à ne la troubler jamais, à quelque extrémité qu’on les réduise. (J.-J. R.)
  5. Lettre 9e, 2e partie, page 181.