Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome25.djvu/378

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Vous vous retranchez à dire que tous ces miracles ont été écrits plusieurs années après le temps où l’on pouvait les examiner, après les témoins morts ; que ces livres ne furent communiqués qu’aux initiés de la secte ; que les magistrats romains n’en eurent pendant cent cinquante ans aucune connaissance ; que l’erreur prit racine dans des caves et dans des greniers ignorés. Je vous renvoie alors à l’empereur Tibère, qui délibéra sur la divinité de Jésus ; à l’empereur Adrien, qui mit dans son oratoire le portrait de Jésus ; à l’empereur Philippe, qui adora Jésus. Vous me niez ces faits : alors je vous renvoie à l’établissement de la religion chrétienne, qui est lui-même un grand miracle. Vous me niez encore que cet établissement soit miraculeux ; vous me dites que notre sainte religion ne s’est formée que comme toutes les autres sectes dans le fanatisme et dans l’obscurité, comme l’anabaptisme, le quakerisme, le moravisme, le piétisme, etc. Alors je ne puis que vous plaindre ; vous me plaignez aussi. Qui de nous deux se trompe ? Je produis mes titres, qui remontent jusqu’à l’origine du monde, et vous n’aviez pour vous que votre raison ; j’ai aussi la mienne, que je prie Dieu d’éclairer : vous ne regardez le christianisme que comme une secte d’enthousiastes, semblable à celle des esséniens, des judaïtes, des thérapeutes, fondée d’abord sur le judaïsme, ensuite sur le platonisme, changeant d’article de foi à chaque concile, s’occupant sans relâche de disputes d’autant plus dangereuses qu’elles sont inintelligibles, versant le sang pour ces vaines disputes, et ayant troublé toute la terre habitable depuis l’Ile d’Angleterre jusqu’aux îles du Japon. Vous ne voyez dans tout cela que la démence humaine ; et moi j’y vois la sagesse divine, qui a conservé cette religion malgré nos abus. Je vois comme vous le mal, et vous n’apercevez pas le bien ; examinez avec moi comme j’examine avec vous.


des miracles après le temps des apôtres.

Jésus, ayant la puissance de faire des miracles, put la communiquer ; s’il la communiqua aux apôtres, il put la donner aux disciples. Les incrédules triomphent de voir que ce don s’affaiblit de siècle en siècle. Ils insultent à la fraude pieuse des historiens chrétiens, et ils disent que parmi tous les miracles dont nous ornons encore les premiers siècles, il n’y en a aucun de prouvé, aucun de vraisemblable, aucun de constaté par les magistrats romains, ni dont leurs historiens romains aient fait mention. Au