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458 ESSAI SUR LES DISSENSIONS

inquisiteur, et son tribunal était très-redoutable. Les Grecs, les évangéliques, les réformés, et les unitaires, qui survinrent, tout fut persécuté. Contrains-les d'entrer ^ fut employé dans toute sa rigueur. C'est une cliose admirable que ce contrains-les d'entrer, qui n'est dans l'Évangile qu'une invitation pressante à souper, ait toujours servi de prétexte à l'Église romaine pour faire mou- rir les gens de faim.

Les évêques ne manquaient pas d'excommunier tout gentil- homme du rite grec ou de la communion protestante; et, par un abus étrange mais ancien, cette excommunication les privait, dans les "diètes, de voix active et passive. L'excommunication peut bien priver un homme delà dignité de marguillier, et même du paradis; mais elle ne doit pas s'étendre sur les effets civils. Un prince de l'empire, un électeur, qu'un évéque ou un chapitre excommunierait, n'en serait pas moins prince de l'empire. On peut juger, par cette seule oppression, combien les dissidents étaient vexés par les tribunaux ecclésiastiques ; il suffit de dire qu'ils étaient jugés par leurs ennemis.

Sigismond-Auguste, le dernier des Jagellons, fit cesser ce dévot scandale. Sa probité lui persuada qu'il ne faut persécuter personne pour la religion. Il se souvint que Jésus-Christ avait enseigné et non opprimé. Il comprit que l'oppression ne pouvait faire naître que des guerres civiles entre les gentilshommes égaux; il fit plus, dans la diète solennelle de Vilna, le 16 juin 1563, « il anéantit toute différence qui pourrait jamais naître entre les citoyens pour cause de religion ». Voici les paroles essentielles de cette loi devenue fondamentale :

(i A compter depuis ce jour, non -seulement les nobles et sei- gneurs avec leurs descendants qui appartiennent à la commu- nion romaine, et dont les ancêtres ont oljtcnu aussi des lettres de noblesse dans le royaume de Pologne, mais encore en général tous ceux qui sont de l'ordre équestre et des nobles, soit lithua- niens, soit russes d'origine, pourvu quHls fassent profession du chris- tianisme, quand même leurs ancêtres n'auraient pas acquis les droits de noblesse dans le royaume de Pologne, doivent jouir, dans toute l'étendue du royaume, de tous les privilèges, libertés, et droits de noblesse, à eux accordés, et en jouir à perpétuité en commun.

« On admettra aux dignités du sénat et de la couronne, à toutes les charges nobles, non-seulement ceux qui appartiennent

1. Luc, XIV, 23.

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