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460 ESSAI SUR LES DISSENSIONS

des soldats et la confession d'Augsbourg. Sigismond se vengea en Pologne du catholicisme, qui lui avait ôté la couronne de Suède.

Les jésuites qui le gouvernèrent, lui ayant fait perdre un royaume, le firent haïr dans l'autre. Il ne put, à la vérité, révo- quer une loi devenue fondamentale, confirmée par tant de rois et de diètes; mais il l'éluda, il la rendit inutile. Plus de charges, plus de dignités données à ceux qui n'étaient pas de la commu- nion de Rome. On ne leur ravit pas leurs hiens, parce qu'on ne le pouvait pas ; on les vexa par une persécution sourde et lente, et, si on les tolérait, on leur lit sentir bientôt qu'on ne les tolére- rait plus dès qu'on pourrait les opprimer impunément.

Cependant la loi fut toujours plus forte que la haine. Tous les rois, à leur couronnement, firent le même serment que leurs prédécesseurs, Ladislas VI, fils de Sigismond le Suédois, n'osa s'en dispenser. Son frère Jean-Casimir, quoiqu'il eût d'abord été jésuite, et ensuite cardinal, fut obligé de s'y soumettre : tant le respect extérieur pour les lois reçues a de force sur les hommes.

Michel Viesnovieski, l'illustre Jean Sobieski, vainqueur des Turcs, n'imaginèrent pas d'éluder cette loi à leur couronnement. L'électeur de Saxe Auguste, ayant renoncé à la religion évan- gélique de ses pères pour acquérir le royaume de Pologne, jura avec plaisir cette grande loi de la tolérance, .dont un roi qui abandonne sa religion pour un sceptre semble avoir toujours besoin, et qui assurait la liberté et les droits de ses anciens frères.

L'Europe sait combien son règne fut malheureux ; il fut dé- trôné par les armes d'un roi luthérien ^ et rétabli par les vic- toires d'un czar de la communion grecque -.

Les prêtres catholiques romains et leurs adhérents crurent se venger du roi de Suède Charles XII en persécutant les Polonais évangéliques, dont il avait été le protecteur : ils en trouvèrent l'occasion l'année 1717, dans une diète toute composée dénonces de leur parti. Ils eurent le crédit, non pas d'abolir la loi, elle était trop sacrée, mais de la limiter. On ne permit aux non- conformistes le libre exercice de leur religion que dans leurs églises précédemment bâties, et on alla même jusqu'à prononcer des peines pécuniaires, la prison, le bannissement, contre ceux qui prieraient Dieu ailleurs. Cette clause d'oppression ne passa

��1. Charles XII; voyez tome XVI, pages 210 et 485.

2. Pierre le Grand voyez tome XVI, pages 264 et 509.

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