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148 VARIANÏKS DADKLAIDE DU GUESCLIN.

Mais si mon infortune a pu vous émouvoir,

Si vous iilaijîiicz ma peine, apprencz-nioi, mon frère,

Quel est l’iieureux amant qu’à Veiulùmc on ])réfère.

Ne connaîtrai-je point l’objet de mon courroux ?

Porterai-je au iuisard ma vengeance et mes coups ?

Ne soupçonnez-vous point à qui je dois ma rage ?

Vous connaissez la cour, ses mœurs, et son langage ;

Vous savez que sur nous, sur nos secrets amours,

Des oisifs courtisans les yeux veillent toujours.

Qui nommc-t-on ? Du moins, qui pense-t-on qu’elle aime ?

NEMOURS,

Eh ! do quels nouveaux traits vous percez-vous vous-même ! De quelque heureux ohjet dont son cœur soit charmé, Ne vous suffit-il pas qu’un autre en soit aimé ?

VENDOME.

Quel plaisir vous sentez, cruel, à me le dire !

Je ne suis point aimé ! quoi ! lâche, je soupire !

Mais, encore une fois, qui puis-je soupçonner ?

Aidez ma jalousie à se déterminer.

Je ne suis point aimé ! Malheur à qui peut l’être !

Malheur à l’ennemi que je pourrai connaître !

J’ai soupçonné Coucy : sa fausse probité

Peut-être se jouait de ma crédulité.

A tout ce que je dis vous détournez la vue ;

L’ingrate, je le sais, vous était inconnue ;

Vous n’avez vu qu’ici ses funestes appas,

Et ma tendre amitié ne vous soupçonne pas.

Peut-être qu’elle aura, pour combler mon injure.

Choisi mon ennemi dans une foule obscure.

Dans son abaissement elle a mis son honneur ;

Sa fierté s’applaudit de braver ma grandeur.

Et de sacrifier au rang le plus vulgaire

Tout l’orgueil de mon rang, oublié pour lui plaire.

NEMOURS.

Pourquoi d’un choix indigne osez-vous l’accuser ?

VENDÔME.

Ah ! pourquoi dans mon cœur osez-vous l’excuser ? Quoi ! toujours de vos mains déchirer ma lilessure ! Allez, je vous croirais l’auteur de mon injure Si… Mais est-il bien vrai, n’aviez-vous vu jamais Cet objet dangereux que j’aime et que je hais ? Est-il vrai ?… Pardonnez ma jalouse furie.

NEMOURS.

Au nom de la nature et du sang cjui nous lie. Mon frère, permettez que, dès ce même jour. Pour vous unir au roi je revoie à la cour : Ces soins détourneront le soin qui vous dévore.

VENDÔME.

Non, périsse plutôt cette cour que j’abhorre ! Périsse l’univers dont mon cœur est jaloux !

NEMOURS.

Eh bien ! oii courez-vous, mon frère ?

VENDÔME.

Loin de vous,

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