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430 COMMENTAIRE

raison ou la démence qui le força d'assassiner celui qui lui avait sauvé la vie. Mais s'il fallait rechercher pourquoi tant de plats tyrans ont commis tant d'extravagances et tant de barbaries, la vie ne suffirait pas ; et quel fruit en pourrait-il revenir? Qu'a de commun l'inepte cruauté de Basile avec l'Esprit des Lois?

XXXIII.

« C'est un grand ressort des gouvernements modérés que les lettres de grâce. Ce pouvoir que le prince a de pardonner, exé- cuté^ avec sagesse, peut avoir d'admirables effets. Le principe du gouvernement despotique, qui ne pardonne pas, et à qui on ne pardonne jamais, le prive de ces avantages. » (Page 103, liv. VI, chap. XVI.)

Une telle décision, et celles qui sont dans ce goût, rendent, à mon avis, l'Esprit des Lois bien précieux. Voilà ce que n'ont ni Grotius, ni Pulfendorf, ni toutes les compilations sur le droit des gens. On sait bien que despotisme est employé pour tyrannie. Car enûn un despote ne peut-il pas donner des lettres de grâce tout aussi bien qu'un monarque? Où est la ligne qui sépare le gouvernement monarchique et le despotique?

La monarchie commençait à être un pouvoir très-mitigé, très-restreint en Angleterre, quand on força le malheureux Charles P' à ne point accorder la grâce de son favori le comte Slrafford. Henri IV en France, roi à peine affermi, pouvait don- ner des lettres de grâce au maréchal de Biron ; et peut-être cet acte de clémence, qui a manqué à ce grand homme, eût adouci enfin l'esprit de la Ligue, et arrêté la main de Bavaillac,

Le faible et cruel Louis XIII devait faire grâce à de Thou et à Marillac.

On ne devrait pas parler des lois et des mœurs indiennes et japonaises, que l'on connaît si peu, quand on a tant à dire sur les nôtres, qu'on doit connaître.

XXXIV.

« Xos missionnaires nous parlent du vaste empire de la Chine qui mêle ensemble dans son principe la crainte, l'hon- neur et la vertu J'ignore ce que c'est que cet honneur dont

on parle chez des peuples à qui on ne fait rien faire qu'à coups de bâton. Il s'en faut beaucoup que nos commerçants nous

1. Il veut dire employé; on n'exécute point un pouvoir. {Note de Voltaire.)

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