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238 REMARQUES SUR SOPHONISBE.

jamais eu de réputation plus usurpée que celle de Saint-Évre- mond.

SCÈNE IV.

Yersdern.El je saurai, pour vous, vaincre ou mourir en roi.

Celle scène devrait être intéressante et sublime. Soplionisbe vent forcer son mari à prendre le parti de Cartilage contre les Romains. C'est un grand objet, et digne de Corneille; si cet objet n'est pas rempli, c'est en partie la faute du style; c'est cette ré- pétition : m aimez-vous , seigneur? oui, m' aimez-vous encore? c'est cette imitation du discours de Pauline à Polyeucte :

Moi qui, pour en étreindre ii jamais les grands nœuds, Ai d'un amour si juste éteinl les plus beaux feux 1 ;

imitation mauvaise : car le sacrifice que Pauline a fait de son amour pour Sévère est touchant, et le sacrifice de Massinisse, que Soplionisbe a fait à l'ambition, est d'un genre tout différent. Enfin Syphax est faible, Soplionisbe veut gouverner son mari ; la scène n'est pas assez fortement écrite, et tout est froid.

Je ne parle point de Carthage abandonnée, qui vaut pour l'un et pour l'nuiir une grande journée; je ne parle pas du style, qui de- vrait réparer les vices du fond, et qui les augmente.

��ACTE DEUXIEME.

On retrouve dans ce second acte des étincelles du feu qui avait animé l'auteur de Cinna et de Polyeucte, etc. Cependant la pièce de Corneille n'eut qu'un médiocre sueccès, et la Soplionisbe de Mairet continua à être représentée. Je crois en trouver la rai- son jusque dans Les beaux endroits même de la Sophonisbe de Corneille. Éryxe, cette ancienne maîtresse de MassinisSse, démêle très-bien l'amour de Massinisse pour sa rivale : tout ce qu'elle dit est vrai ; mais ce vrai ne peut toucher. Elle annonce elle- même que Soplionisbe est aimée : dès lors, plus d'incertitude dans l'esprit du spectateur, plus de suspension, plus de crainte.

1. C'est à son père, et non à Polyeucte, que Pauline fait cet aveu. L'édition de [664 el les éditions postérieures portent :

Et .j'ai, pour l'accepter, éteint le plus beau feu Qui 'l'une ime bien r.éc ait mérité l'aveu.

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