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ANNÉE 1722.

cier de tout ce que vous faites. J’en suis pénétré au dernier point, et je vous jure que je ne l’oublierai jamais. Je vous suis surtout très-obligé d’aller souvent chez ma sœur[1]. Mon cœur a toujours été tourné vers elle ; je suis sûr que vous lui donnerez un peu d’amitié pour moi.

Demoulin poursuit en mon nom la condamnation de Beauregard. Je suis ruiné en frais. Pour comble, il me mande que le lieutenant-criminel a envoyé chercher toutes les pièces chez mon procureur ; je ne sais si c’est pour rendre ou pour me dénier sa justice ; j’attends en paix l’événement.

Vous ne me mandez point comment vous vous êtes retiré d’avec Coypel. Vous ferez ce qu’il vous plaira des culs-de-lampe. J’ai donné au même homme les idées de plusieurs vignettes ; je vous en enverrai incessamment les dessins, qu’il a promis de bien travailler. Nous avons carte blanche sur tout. Mandez-moi, mon cher ami, comment nos peintres ont traité les sujets des estampes, afin que je voie les idées qui nous resteront pour les vignettes.

Je vous remercie du discours du cardinal[2] ; il est plein d’esprit et très-convenable. Si le style en était plus lumineux et plus coulant, cela serait parfait. Je vous quitte de celui de Fontenelle, où il y aurait sans doute beaucoup d’antithèses et plus de points que de virgules. J’aime mieux vos lettres, mon cher ami, que toutes les harangues de l’Académie. La mienne est bien courte mais j’en ai quinze à écrire. Adieu.



76. — À MADAME LA PRÉSIDENTE DE BERMÈRES[3].

À la Source[4].

Nous voilà arrivés dans notre ermitage. On n’a peut-être jamais été à la campagne plus mal à propos : c’est s’enfuir la veille d’une bataille ; mais je vous promets de revenir dès le moment que vous jugerez ma présence nécessaire. Écrivez-moi, je vous prie, un peu souvent de vos nouvelles et des miennes ; mandez-moi comment mon fils[5] réussit dans le monde ; s’il a beaucoup

  1. Marie Arouet, mariée à Pierre-François Mignot, correcteur de la chambre des comptes ; mère de l’abbé Mignot, de Mme Denis, et de Mme de Fontaine. Morte vers le commencement de septembre 1726.
  2. Discours dont il est question dans la lettre no 72.
  3. Éditeurs, de Cayrol et François.
  4. Château ainsi appelé parce que le Loiret prend sa source dans le parc.
  5. La Henriade.