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ANNÉE 1731.

et il faudrait qu’en ce cas-là même le libraire chargé de l’impression n’en fut que plus secret et plus diligent.

Voilà, mon cher monsieur, mon ancien ami, et mon ancien camarade, et mon confrère en Apollon, ce qui lutine pour le présent ma pauvre petite tête.

Dans cet embarras, je vais vous envoyer, par le carrosse, le premier volume de cette histoire. C’est le seul exemplaire qui me reste de deux mille six cents qui ont été saisis, après avoir été munis d’une approbation au sceau.

Je m’adresse à vous hardiment pour redresser ce tort. Peut-être, en lisant l’ouvrage, le trouverez-vous moins indigne de l’impression, et vous intéresserez-vous à la destinée de mon pauvre enfant, qu’on a si mal traité.

Quand vous l’aurez lu, je laisse à votre amitié et à votre prudence à m’indiquer la voie la plus sûre pour réussir dans cette affaire, que j’ai extrêmement à cœur. Surtout je vous demande en grâce que vous ne fassiez point courir ce livre dans Rouen, que qui que ce soit ne sache mon dessein d’y venir, et que le livre ne soit communiqué qu’à la personne qui pourra se charger d’obtenir cette permission tacite, en cas que vous ne vouliez pas vous compromettre.

S’il arrive, par malheur, qu’aucune des voies que je vous propose ne puisse réussir, alors vous me renverrez mon livre par la voie que j’aurai l’honneur de vous indiquer.

En attendant, je vous prie de m’adresser votre réponse sous l’enveloppe de M. de Livry[1], secrétaire du roi, rue de Condé, Je vous aime et estime trop pour vous faire des excuses de la liberté que je prends avec vous : il n’y a personne dans le monde à qui je fusse plus aise d’avoir obligation ; songez que le plaisir que je vous demande est un des plus sensibles que je puisse jamais avoir : c’est celui de pouvoir être à portée de vous voir pendant trois mois.

Adieu ; je suis pour toute ma vie votre très-humble et obéissant serviteur.



208. — À M. DE CIDEVILLE.
À Paris, ce 3 février 1731.

Mon cher Cideville, je suis enchanté, pénétré de vos bontés, M. de Lézeau doit vous avoir remis la première partie, qui a été

  1. Sans doute parent de Louis Sanguin, marquis de Livry, dont il est question dans la Fête de Bélébat. (Cl.)