Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome34.djvu/188

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dit-on, des copies ! Si vous voulez suivre le train ordinaire, et qu’on imprime à présent, renvoyez-nous la copie que vous avez, avec annotations ; il y a dans cette copie nouvelle du bon en petite quantité, qu’il faut conserver. Je crois la tournure des premiers actes meilleure de cette seconde cuvée. Je demande toujours un passe-port pour monsieur le président, car monsieur le sénéchal me paraît si provincial et si antiquaille que je ne peux m’y faire. Si vous avez quelque chose à me mander librement, vous savez le moyen, vous avez l’adresse. Au reste je vous avertis que, quand vous voudrez avoir une tragédie, il faudra faire vos supplications à la divinité newtonienne, qui, à la vérité, soutire les vers, mais qui aime passionnément la règle de Kepler, et qui fait plus de cas d’une vérité que de Sophocle et d’Euripide.

Qu’avez-vous ordonné du sort de ce petit écrit[1] sur les trois infâmes épîtres de mon ennemi ? Vous sentez qu’on obtient aisément d’imprimer contre moi ; mais quiconque prend ma défense est sûr d’un refus. En vérité, méritai-je d’être ainsi traité dans ma patrie ? Votre amitié et Cirey me soutiennent.

Vous croyez que Mme  du Châtelet vous dit toutes les choses tendres que vous méritez,


692. — À M. DE MAIRAN.
À Cirey, le 1er décembre.

J’abuse de vos bontés, monsieur ; mais vous êtes fait pour donner des lumières, et moi pour en profiter.

Sur ce que vous me dites, dans votre lettre, que vous vous êtes bien trouvé de ne jamais admettre de merveilleux mathématique, j’ai consulté le Mémoire de 1715, que vous m’indiquez, et j’ai vu le prétendu merveilleux de la roue d’Aristote réduit aux lois mathématiques. Il est clair que vous avez très-bien expliqué ce qui était échappé à Tacquet et aux autres.

J’ose croire sur ce fondement que peut-être ne vous éloignerez, vous pas de mes idées, sur la question d’optique que j’ai pris la liberté de vous proposer. Ni Tacquet, ni Barrow, ni Grimaldi, ni Molineux, n’ont pu la résoudre. C’était une question du ressort du Père Malebranche, mais il ne l’a point traitée ; et j’ai grand’-peur qu’il ne s’y fût trompé, comme il a fait, à mon avis, sur la raison pour laquelle nous voyons le soleil et la lune plus grands à l’horizon qu’au méridien.

  1. L’Utile Examen ; voyez tome XXII, page 233.