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faiblesses, si faiblesse y a de trop admirer les chefs-d’œuvres de la nature.

D’un raisonnement de philosophie, je me vois insensiblement engagé dans un avorton de déclaration d’amour ; et, tandis que ma métaphvsique garde le slyle de Wolff, ma morale pourrait bien ressembler un peu à celle que Rameau réchauffe des sons de sa musique[1].

Quant à l’amitié, je vous prie de me croire constant, me déterminant difficilement à donner mon cœur, mais faisant des choix à ne me repentir jamais. Je suis avec l’estime que vous méritez plus que qui que ce soit, monsieur, votre très-affectionné ami,

Fédéric

774. — À M. L’ABBÉ MOUSSINOT[2].
Ce 17 (auguste 1737).

En réponse à vos dernières du 9 et du 14.

J’ai reçu, mon cher abbé, la rescription de deux mille quatre cents livres, et j’attends les caisses qui doivent arriver par Bar-sur-Aube,

Je ne savais pas la commission établie pour la liquidation des dettes de M. de Guise. Tout ce que je sais, c’est que l’on doit absolument poursuivre cette affaire par les voies que le roi a ouvertes. Je ne veux pas que l’on reçoive rien de M. de Guise. Il faut s’adresser à M. de Machault ou à son secrétaire. Je vous prie très-instamment de parler ou faire parler à l’un et à l’autre.

Il faut représenter que j’ai prêté mon argent comptant ; qu’une rente viagère doit être sacrée ; qu’on m’en doit trois années ; que M. le prince de Guise m’a toujours caché l’établissement de cette commission ; en un mot, après avoir représenté mon droit, et la lésion que je souffre, vous me manderez la réponse, et vous agirez comme il conviendra en justice. Je ne crois pas qu’une commission établie par le roi soit établie pour frustrer des créanciers. Au contraire, je me flatte surtout que les rentes viagères doivent être exceptées des lois les plus favorables aux débiteurs de mauvaise volonté.

Il faut surtout savoir si cette commission regarde les rentes viagères, si elle n’est point établie pour la liquidation des biens de feu Mme  de Guise.

Il se peut très-bien encore que, malgré cette commission, on

  1. Allusion aux vers 141-42 de la satire x de Boileau :
    Et tous ces lieux communs de morale lubrique,
    Que Lulli réchaufta des sons de sa musique.
  2. Édition Courtat.