Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome34.djvu/361

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

et les princes s’empressent à rendre hommage à Mme  de La Popelinière.

Mais, quoi ! si ma muse échauffée
Eût loué cet objet charmant,
Qui réunit si noblement
Les talents d’Euclide et d’Orphée,
Ce serait un faible ornement
Au piédestal de son trophée.
La louer est un vain emploi ;
Elle régnera bien sans moi
Dans ce monde et dans la mémoire ;
Et l’heureux maître de son cœur,
Celui qui fait seul son bonheur.
Pourrait seul augmenter sa gloire.

À propos de vers, on imprime l’Enfant prodigue un peu différent de la détestable copie qu’ont les comédiens, et que vous avez envoyée (dont j’enrage) au prince royal.

Je n’ai encore fait que deux actes de Mèrope, car j’ai un cabinet de physique qui me tient au cœur.

Pluribus attentus, minor est ad singula sensus.

Je trouve dans Castor et Pollux des traits charmants ; le tout ensemble n’est pas peut-être bien tissu. Il y manque le molle et amœnum[1], et même il y manque de l’intérêt. Mais, après tout, je vous avoue que j’aimerais mieux avoir fait une demi-douzaine de petits morceaux qui sont épars dans cette pièce qu’un de ces opéras insipides et uniformes. Je trouve encore que les vers n’en sont pas toujours bien lyriques, et je crois que le récitatif a dû beaucoup coûter à notre grand Rameau. Je ne songe point à sa musique, que je n’aie de tendres retours pour Samson, Est-ce qu’on n’entendra jamais à l’Opéra :

Profonds abîmes de la terre,
Enfer, ouvre-toi, etc. ?

( Acte V, sc. i.)

Mais ne pensons plus aux vanités du monde.

Je vous remercie, mon ami, d’avoir consolé[2] mes nièces. Je ne leur proposais un voyage à Cirey qu’en cas que leurs affaires et les bienséances s’accordassent avec ce voyage. Mais voici une autre négociation qui est assez digne de la bonté de votre cœur

  1. Molle atque facetum. Horace I, sat. x, vers 44.
  2. Voyez la lettre 786.