Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome34.djvu/459

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

me dispenser d’écrire : je n’aime pas à demander, à moins que ce ne soit pour d’autres.

Vraiment, vous m’avez fait une belle tracasserie avec le sieur Médina[1]. Ah ! mon cher abbé, ne montrez donc point mes lettres. Je veux bien obliger ce Médina ; je veux bien aussi ne point perdre l’argent que je lui prête ; mais je ne voulais pas qu’il fût instruit de la défiance très-raisonnable que j’ai du payement. J’avais grande raison de demander une signature d’homme solvable ; mais aussi je voulais et je devais lui épargner la mortification d’un refus qui lui fît sentir que l’état où il est est trop connu. C’est un homme obéré que je voulais servir avec un peu de prudence, sans lui marquer que je suis instruit du mauvais état de ses affaires. Si vous pouvez raccommoder ce petit mal-là, vous me ferez plaisir, sinon je m’en console aisément.

Je serais bien aise de savoir si en effet il y a un Rousseau, cordonnier, rue de la Harpe.

J’attends la décision du second cas, et vous remercie de la décision du premier.

Peu importe que l’homme en question soit ou calviniste, ou janséniste, ou juif, ou musulman, ou païen ; ce qui importe, c’est de savoir si, ses biens ayant été confisqués par justice, ses rentes viagères y sont comprises, et si ses billets antérieurs à cette confiscation sont valables au profit de ses créanciers. À en juger par les pauvres lumières de la raison, cela doit être ainsi, et qu’on ait confisqué, par exemple, le bien de M. de Bonneval, le musulman, en 1730, je ne dois pas moins être payé de ce qu’il me devait en 1729 : car ce qu’il me devait était mon bien, non le sien ; mais ce bien était une rente de M. de Bonneval, non échue alors, et confisquée depuis. La justice, en ce cas, n’est-elle pas contraire à la raison ? Voilà ce que je demande à votre raison très-juste.

Je supplie monsieur votre frère de me dire s’il connaît le sieur Parfait ; quel homme c’est, et si c’est lui qui a imprimé le livre en question.


849. — À M. BERGER.
Cirey, avril.

Mme  la marquise du Châtelet a renvoyé le livre que vous lui avez prêté. Il doit être chez l’abbé Moussinot. Après la honte de barbouiller de tels ouvrages, la plus grande est de les lire : aussi

  1. Voltaire vient de le nommer « Médine ». (C)