Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome34.djvu/472

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chancelier, j’ai cessé sur-le-champ d’envoyer en Hollande la suite du manuscrit ; le dernier chapitre surtout, qui regarde les sentiments théologiques de M. Newton, n’est pas sorti de mes mains. Si donc il arrive que cet ouvrage tronqué paraisse en France par la précipitation des libraires, et si monsieur le chancelier m’en savait mauvais gré, il serait aisé, par l’inspection seule du livre, de le convaincre de ma soumission à ses volontés. Le manque des derniers chapitres est une démonstration que je me suis conformé à ses idées, dès que je les ai pu entrevoir ; je dis entrevoir, car il ne m’a jamais fait dire qu’il trouvât mauvais qu’on imprimât le livre en pays étranger. En un mot, soit respect pour monsieur le chancelier, soit aussi amour de mon repos, je ne veux point de querelle pour un livre ; je les brûlerais plutôt tous. Voulez-vous lire ce petit endroit de ma lettre à M. d’Argenson[1] ? Est-il à propos que je lui en écrive ? Conduisez-moi. M. le bailli de Froulai est venu ici, et a été, je crois, aussi content de Cirey que vous le serez. Les Denis en sont assez satisfaits.

J’ai toujours Mérope sur le métier. Vale, te amo.


855. — À M. L’ABBÉ MOUSSINOT[2].
Ce 29 (avril 1738).

Je reçois, mon cher ami, votre lettre du 26.

Je ne pouvais deviner que M. le caissier n’exigeait point vingt pistoles, quand vous me mandiez : Il faut lui donner vingt pistoles. Cet il faut n’avait-il pas l’air d’un droit exigé ? et ce demi pour cent ne ressemblait-il pas au demi pour cent exigé par les notaires ? Toute la différence était que les notaires reçoivent cette rétribution de ceux qui empruntent, et qu’on paraissait l’exiger de moi, qui prêtais.

Un caissier aurait sans doute très-mauvaise grâce d’exiger quelque rétribution de ceux qui prêteraient à son maître. Si j’étais receveur général, et que mon caissier fît cette manœuvre, il ne la ferait pas longtemps. Cependant, comme toute peine mérite salaire, j’ai toujours eu intention que l’on fît un présent à ce caissier, uniquement pour sa peine de compter l’argent, et

  1. René-Louis de Voyer de Paulmy, marquis d’Argenson, fils de Marc-René, était né en octobre 1694. Il fut, en 1737, nommé ambassadeur en Portugal, mais il n’y alla pas, et Chavigny fut nommé à sa place en 1740. Il fut, en novembre 1744, nommé ministre des affaires étrangères, et se démit le 3 janvier 1747. Il est mort le 20 janvier 1757.
  2. Édition Courtat.