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Si vous voulez prendre la peine, même, d’en faire rendre quelques-uns dans votre quartier, grand merci.

M. Cousin ira chez M. Thieriot, et fera tous les voyages et les emballages, il ira chercher les livres chez le relieur. Il faut bien qu’il se donne un peu de peines[1].


899. — À M. BERGER.
Cirey, juillet.

Je serais fort aise que vous fussiez auprès de M. Pallu, et je crois que cette place vaudrait mieux que la demi-place que vous avez. Un intendant est plus utile qu’un prince[2]. Je perdrais un aimable correspondant à Paris ; mais j’aime mieux votre fortune que des nouvelles.

Mme du Châtelet ne peut s’avilir en souffrant qu’on imprime un écrit qu’elle a daigné composer, qui honore son sexe et l’Académie, et qui fait peut-être honte aux juges qui ne lui ont pas donné le prix.

Je me donnerai bien de garde de demander à aucun ministre la communication des recueils dont vous me parlez. Je ne leur demande jamais rien ; mais j’aurais été fort aise que mon ami, en lisant eût remarqué quelques faits singuliers et intéressants, s’il y en a, et m’en eût fait part. C’est là ce qui est très-aisé, et ce dont je vous prie encore.

Vous n’envoyez jamais les nouveautés. Nous n’en avons pas un extrême besoin, mais elles amuseraient un moment ; et c’est beaucoup, me semble, de plaire un moment à la divinité de Cirey.

Rousseau m’a envoyé l’ode apoplectique dont vous me faites mention. Il m’a fait dire que c’était par humilité chrétienne ; qu’il m’avait toujours estimé, et que j’aurais été son ami si j’avais voulu, etc. Je lui ai fait dire qu’il y avait en effet de l’humilité à avoir composé cette ode, et beaucoup à me l’envoyer ; que, si c’était de l’humilité chrétienne[3], je n’en savais rien, que je ne m’y connaissais pas, mais que je me connaissais fort en probité ; qu’il fallait être juste avant d’être humble ; que, puisqu’il m’estimait, il n’avait pas dû me calomnier, et que, puisqu’il m’avait calomnié, il devait se rétracter, et que je ne pouvais pardonner qu’à ce prix. Voilà mes sentiments, qui valent bien son ode.

  1. La fin de la lettre 893, du 3 juillet précédent, à partir des mots : « Vous donnerez donc, mon cher abbé, cinq cents livres à Prault, » est ici répétée textuellement.
  2. Berger était secrétaire du prince de Carignan.
  3. Voyez la lettre 885.