Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome35.djvu/434

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qui l’a lue, dit que c’est un opéra à la Milton. Voyez de Rameau ou de Mondonville qui vous voudrez choisir, ou qui voudra s’en charger ; mais voyez auparavant si cela mérite qu’on s’en charge.

Il y a une lettre de milord Hervey[1] entre les mains de l’abbé Moussinot, que je voudrais, en qualité de bon Français, qui fût un peu connue. Il vous en donnera copie. Un peu de secret pour Pandore. Je vous embrasse de tout mon cœur.

Je ne puis me mêler de proposer un intendant à M. le duc de Richelieu. Si je le pouvais, cela serait fait. Adieu encore une fois.


1269. — DE FRÉDÉRIC, PRINCE ROYAL DE PRUSSE,
Berlin, 26 avril.

Mon cher Voltaire, les galions de Bruxelles m’ont apporté des trésors qui sont pour moi au-dessus de tout prix. Je m’étonne de la prodigieuse fécondité de votre Pérou, qui paraît inépuisable. Vous adoucissez les moments les plus amers de ma vie. Que ne puis-je contribuer également à votre bonheur ! Dans l’inquiétude où je suis, je ne me vois ni le temps ni la tranquillité d’esprit pour corriger Machiavel. Je vous abandonne mon ouvrage, persuadé qu’il s’embellira entre vos mains ; il faut votre creuset pour séparer l’or de l’alliage.

Je vous envoie une épître[2] sur la nécessité de cultiver les arts ; vous en êtes bien persuadé, mais il y a bien des gens qui pensent différemment. Adieu, mon cher Voltaire ; j’attends de vos nouvelles avec impatience ; celles de votre santé m’intéressent autant que celles de votre esprit. Assurez la marquise de mon estime, et soyez persuadé qu’on ne saurait être plus que je ne le suis votre très-fidèle ami,

Fédéric.

1270. — DE FRÉDÉRIC, PRINCE ROYAL DE PRUSSE.
Remusberg, 3 mai.

Mon cher Voltaire, il faut avouer que vos rêves valent les veilles de beaucoup de gens d’esprit : non point parce que je suis le sujet de vos vers, mais parce qu’il n’est guère possible de dire de plus jolies choses et de plus galantes sur un plus mince sujet.

Ce dieu du Goût dont tu peignis le temple,
Voulant lui-même éclairer l’univers,

  1. C’est la lettre 1262.
  2. Il est question de cette èpître dans la lettre 1280.