Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome35.djvu/563

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ridicule avec les libraires Ledet, qui se plaignent mal à propos que je favorise Prault le fils à leur préjudice, et qui, sur cela, font cent impertinences. Mme de Champbonin en a parlé fortement à ce ministre, qui a déjà eu la bonté d’agir. Je vous prie de seconder Mme de Champbonin : elle est ma parente ; soyez aussi mon parent. Dites, pour Dieu, tout le bien de moi que vous ne pensez pas ; mettez-moi très-bien dans l’esprit de l’ambassadeur d’une nation libre ; et sans entrer dans le détail fastidieux de cette affaire, gagnez-moi le cœur de cet homme-là : vous avez le mien pour jamais.


1386. — À FRÉDÉRIC II. ROI DE PRUSSE[1].
À quatre lieues par delà Wesel, je ne sais où,
ce 6 décembre.

détestable Veslphalie !
Vous n’avez chez vous ni vin frais,
Ni lit, ni servante jolie ;
De couvents vous êtes remplie,
Et vous manquez de cabarets,
quiconque veut vivre sans boire,
Et sans dormir, et sans manger,
Fera très-bien de voyager
Dans votre chien de territoire.
Monsieur l’évêque de Munster,
Vous tondez donc votre province !
Pour le peuple est l’âge de fer,
Et l’âge d’or est pour le prince.
Je vois bien maintenant pourquoi,
Dans cette maudite contrée,
On donna la paix[2] et la loi
À l’Allemagne déchirée.
Du très-saint empire romain
Les sages plénipotentiaires,
Dégoûtés de tant de misères,
Voulurent en partir soudain.
Et se hâtèrent de conclure
Un traité fait à l’aventure,
Dans la peur de mourir de faim.
Ce n’est pas de même à Berlin ;

  1. Cette lettre, où Voltaire a l’air de s’adresser à Algarotti, était en réalité pour Frédéric.
  2. Le 24 octobre 1648.