Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome36.djvu/133

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

retenait, et qui sera attaché à jamais à Votre Majesté avec le plus profond respect et la plus tendre vénération.


1506. — À M. DE CIDEVILLE,
à paris, rue de richelieu.
De Versailles, ce dimanche, juin[1].

Mon très-aimable ami, je m’intéresse plus au cul dont vous me parlez qu’à toutes les pauvres petites pièces que jouent ici d’assez médiocres acteurs. Vous m’intéressez pour le succès de Mlle Gautier, par la manière dont vous me parlez. Je voudrais bien qu’il y eût encore en France quelques personnes qui aimassent les arts, qui les cultivassent comme vous : nous aurions un beau siècle mais qu’avons-nous ? cela fend le cœur.

Bonjour j’espère vous embrasser bientôt. V.


1507. DE FRÉDÉRIC II, ROI DE PRUSSE.
Camp de Kuttenberg, 18 juin.

Les palmes de la Paix[2] font cesser les alarmes ;
Au tranquille olivier nous suspendons nos armes.
Déjà l’on n’entend plus le sanguinaire son
Du tambour redoutable et du bruyant clairon ;
Et ces champs que la Gloire, en exerçant sa rage,
Souillait de sang humain, de morts, et de carnage,
Cultivés avec soins, fourniront dans trois mois
L’heureuse et l’abondante image
D’un pays régi par les lois.

Tous ces vaillants guerriers que l’intérêt du maître
Ou rendait ennemis, ou le faisait paraître,
De la douce amitié resserrant les liens,
Se prêtent des secours et partagent leurs biens.
La Mort l’apprend, frémit ; et ce monstre barbare,
De la Discorde en vain secouant les flambeaux,
Se replonge dans le Tartare,
Attendant des crimes nouveaux.

  1. Mlle Gautier débuta le 30 mai 1742, et fut reçue parmi les comédiens français le 11 juin 1742. Cette lettre où il est question de ses succès doit être de la première quinzaine de juin. (B.)
  2. Par un premier traité, signé le 11 juin 1742, à Breslau, Frédéric venait de s’engager tout à coup à garder la neutralité avec la reine de Hongrie Marie-Thérèse, moyennant la cession que cette princesse lui fit de la Silésie et du comté de Glatz. (Cl.)