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Je vous supplie de vouloir bien me dire où l’on est parvenu à peu près de cette Histoire universelle. Si on va du même train que les deux premiers volumes, ce livre tiendra lieu de tous les livres historiques. Je sens, monsieur, que vous êtes avec moi dans ce cas, vous me tiendrez lieu de tous les hommes de votre robe. Comptez que vous me donnez une grande envie de vous voir, et de vous dire que je vous aime comme si j’avais vécu avec vous aussi longtemps que les honnêtes gens de Londres.


1557. ‑ À M. DE MONCRIF.
1er février.

J’ai été enchanté, monsieur, de vous retrouver, et de retrouver l’ancienne amitié que vous m’avez témoignée. Je vous remercie encore de l’humanité que vous avez fait paraître, en examinant les ouvrages d’un homme[1] qui était l’ennemi du genre humain. Si tous les gens de lettres pensaient comme vous, le métier serait bien agréable. Ce serait alors qu’on aurait raison de les appeler humaniores litteræ. J’ai oublié d’écrire à M. d’Argenson[2] que je le suppliais de me recommander à M. Maboul[3] ; mais avec vous, monsieur, on a beau avoir oublié ce qu’on voulait, vous vous en souviendrez. Je vous prie donc de vouloir bien suppléer mes péchés d’omission, et de dire à M. d’Argenson qu’il ait la bonté de me recommander fortement et généralement.


Ces deux adverbes joints font admirablement.

(Molière, Femmes savantes, acte III, scène ii.)

Le roi m’a donné son agrément pour être de l’Académie, en cas qu’on veuille de moi. Reste à savoir si vous en voulez. Vous savez que, pour l’honneur des lettres, je veux qu’on fasse succéder un pauvre diable à un premier ministre[4] ; je me présente pour être ce pauvre diable-là.

J’écris à la plus aimable sainte[5] qui soit sur la terre. Elle

  1. Moncrif devait donner une édition des OEuvres de J.-B. Rousseau. (K.)
  2. Le comte d’Argenson venait d’être nommé secrétaire d’État au département de la guerre, à la place du marquis de Breteuil, mort subitement ; et comme conseiller d’État, il dirigeait le bureau des affaires de chancellerie et de librairie. (Cl.)
  3. M. Maboul, parent de Jacques Maboul, évêque d’Alet, était maître des requêtes et membre du bureau des affaires de chancellerie et librairie, sous la direction du comte d’Argenson. (Cl.)
  4. Le cardinal de Fleury, mort à Issy le 29 janvier précédent.
  5. La maréchale de Villars, qui était devenue dévote, mais que Voltaire aimait et respectait toujours.