Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome36.djvu/219

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Et c’est un autre Cideville
Qui, par malheur, est couronné.

Un Diogène insupportable,
Moitié sophiste et moitié chien,
Croit placer le souverain bien
À donner tous les rois au diable.
Pour moi, je suis plus sociable
Je hais, il est vrai, tout lien ;
Mais être roi ne gâte rien,
Lorsque d’ailleurs on est aimable.

Vous m’avouerez encore que je dois au moins la préférence à Sa Majesté le roi de Prusse sur l’ancien évêque de Mirepoix.


Quand ce monarque singulier
Daigne d’un regard familier
Échauffer ma muse legère,
Me chérit et me considère,
Mon sort est toujours de deplaire
Au révérend père Boyer,
Lequel voudrait dans son foyer
Brûler et Racine et Molière,
Et la Henriade et Voltaire,
Et ma couronne de laurier :
C’est là ce qui me désespère.

Je veux, en partant de Berlin,
Demander justice au saint-père ;
J’irai baiser son pied divin,
Et chez vous je viendrai soudain
Avec indulgence plénière :
Car le sage Lambortini[1]
N’est point cagot atrabilaire ;
Il est rempli de la lumière
Di questi grandi Romani.
Admiré de la terre entière,
Des beaux-arts il est défenseur,
Et le successeur de saint Pierre
De Léon Dix est successeur.

Je veux avoir enfin Rome pour mon amie,
Et, malgré quelques vers hardis,
Je veux être un élu dans le saint paradis,
Si je suis réprouvé dans votre Académie.

  1. Benoit XIV, auquel Voltaire dédia Mahomet, ou le Fanatisme en 1715.