Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome37.djvu/532

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vous l’avez marqué, ou davantage, pour l’ouvrage qu’il a écrit contre moi à Francfort ;

2° Que quand il m’écrivit de Copenhague, sans que j’eusse l’honneur de le connaître, il data sa lettre du château, et me fit entendre que le gouvernement l’avait chargé de l’édition des auteurs classiques français ; et que M. de Bernstorff, secrétaire d’État, m’a écrit le contraire ;

3° Que, quelques jours après, étant renvoyé de Copenhague, il m’envoya de Berlin à Potsdam, à ma réquisition, son livre intitulé Qu’en dira-t-on ? dans lequel il dit que le roi de Prusse a des gens de lettres auprès de lui, par le même principe que les princes d’Allemagne ont des bouffons et des nains ;

4° Qu’il me promit de supprimer ce compliment, et qu’il ne l’a pas fait ;

5° Qu’il me reproche, dans ce livre, d’avoir sept mille écus de pension, et qu’il doit savoir, à présent, que j’y ai renoncé, aussi bien qu’à des honneurs que je crois inutiles à un homme de lettres ; et que, dans l’état où je suis, il y a peu de générosité à persécuter un homme dont il n’a jamais eu le moindre sujet de se plaindre ;

6° Qu’il est vrai que je lui donnai des conseils sur quelques méprises où il était tombé, et sur son étonnante hardiesse ; qu’à la vérité il a suivi mes avis sur des faits historiques, mais qu’il les a bien négligés dans quelques exemplaires imprimés à Francfort, où il dit qu’il a vu, à la cour de Dresde, un roi… et tout le reste qui a fait frémir d’horreur. Il ose parler contre le gouvernement et l’armée du roi de Prusse ; il s’élève presque contre toutes les puissances. L’Arétin gagnait autrefois des chaînes d’or à ce métier, mais aujourd’hui elles sont d’un autre métal. Je souhaite seulement qu’on pardonne à sa jeunesse, ou qu’il ait une armée de cent mille hommes.

7° Il est bien le maître d’écrire contre moi, ainsi que contre tous les princes ; il n’y gagnera pas davantage.

8° Il vous mande qu’il me poursuivra jusqu’aux enfers ; il peut me poursuivre tant qu’il lui plaira jusqu’à la mort : il n’attendra pas longtemps ; il poursuivra un homme qui ne l’a jamais offensé. Milord Tyrconnell est mort ; mais ceux qui étaient auprès de lui sont témoins que je rendis service à M. de La Beaumelle, et que, seul, j’empêchai milord Tyrconnell d’envoyer directement au roi de Prusse une lettre dont la minute doit exister encore, et dans laquelle il demandait vengeance. Je ne m’oppose point à la reconnaissance dont il me menace.