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à Liège que s’imprime le Journal encyclopédique auquel vous m’apprenez que vous travaillez. M.  Durant, qui m’a fait aussi l’honneur de m’écrire quelquefois, et qui est, je pense, votre associé, a toujours daté de cette ville. Je me croirais très-heureux, monsieur, de vous pouvoir être de quelque utilité, à l’un et à l’autre. Il m’a paru qu’il y avait dans ce journal beaucoup d’articles bien faits et intéressants. J’ai lieu de croire qu’ils sont de vous deux. C’est le seul journal qui me parvienne : je suis très-peu au fait de la littérature moderne dans mes deux retraites de Lausanne et du voisinage de Genève, mais s’il se trouve quelque occasion de vous marquer, monsieur, combien je suis sensible à votre politesse, je la saisirai avec empressement. Les maladies dont je suis accablé ne me permettent pas les longues lettres, mais elles ne dérobent rien aux sentiments avec lesquels j’ai l’honneur d’être, monsieur, etc.


3287. — DE CHARLES-THÉODORE,
électeur palatin.
Manheim, ce 12 janvier.

Je vous suis très-obligé, monsieur, de l’Essai sur l’Histoire générale que vous m’avez envoyé. Je le lirai avec toute l’attention que vos ouvrages méritent à si juste titre. On ne peut s’instruire plus solidement et plus agréablement que par des faits historiques choisis et traités par un génie tel que le vôtre.

Vous avez bien raison de dire que les siècles passés n’ont pas produit d’événements plus singuliers que ceux que nous voyons sous nos yeux. Ce siècle poli, qui devait même passer pour un siècle d’or, à peine est-il au-delà de sa moitié qu’il est souillé par l’assassinat d’un grand roi. Il me parait que notre siècle ressemble assez à ces sirènes dont une moitié était une belle nymphe, et l’autre une affreuse queue de poisson. Ce serait pour moi une vraie satisfaction de pouvoir m’entretenir avec vous sur de pareilles matières, et j’espère même que, votre santé vous le permettant, les sentiments que vous voulez bien avoir pour moi me procureront bientôt ce plaisir. Si en tous cas vous en êtes empêché, faites-moi le plaisir de me confier vos idées sur la situation présente de l’Europe. Vous pouvez m’écrire en toute liberté ; vous êtes dans un pays libre, et je suis aussi discret et aussi honnête homme qu’aucun de vos républicains.

Je vous prie d’être persuadé de l’estime toute particulière avec laquelle Je suis, etc.


Charles-Théodore, électeur.