Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome39.djvu/335

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Heureusement les Autrichiens nous vengent ; ils gagnent une bataille longue et meurtrière sous les murs de Breslau, ils prennent le prince Bevern prisonnier, ils sont dans Breslau. L’impératrice reprend sa chère Silésie, excepté Neisse, et la Barbarini, qu’elle n’a pas encore, mais qu’elle aura sûrement, à moins d’un miracle, et Dieu n’en fait point pour notre mécréant. Je lui donne des conseils de Cinéas, et j’ai peur qu’il ne finisse bientôt comme Pyrrhus. Vous souvenez-vous de quel air je prenais la liberté de corriger ses vers et sa prose ? Je lui parle de même sur son état. C’est la seule vengeance que je puisse prendre, et elle est fort honnête. Sa gloire est en sûreté : après nous avoir bien battus, et nous avoir accablés de bons mots et de caresses, il ne devrait plus songer qu’à vivre tranquille, à ne pas s’exposer à la cérémonie du ban de l’empire, et à devenir philosophe. Il devrait aussi quelque honnêteté à ma nièce ; mais il n’est pas galant. Je me flatte que M.  de Richelieu fera décimer les Hanovriens. Je ne sais comment les sujets du roi d’Angleterre se sont mis à mériter la hart sur terre et sur mer.

Je reviens à l’hôpital dont j’étais parti : il est clair que cette maison ne sera pas sitôt fondée ; mais je vous prie d’assurer M.  de Chamousset de ma sincère et stérile estime ; je voudrais qu’on le fît prévôt des marchands. Il est honteux qu’un homme qui a des intentions si nobles, et qui paraît si exact et si laborieux, ne soit pas en place : c’est un malheur public qu’il ne soit pas employé.

Mais vous ! quand le serez-vous ? Vous êtes une preuve que les talents ne sont pas tous mis en œuvre. Je bénis Dieu que vous ayez quitté Berlin ; mais je suis fâché que vous n’ayez pas trouvé mieux à Paris, où vous deviez trouver tout. Mes compliments, je vous prie, au laborieux mortel à qui je dois de belles tulipes.


Diener Voltaire.

3483. — À M.  TRONCHIN, DE LYON[1].
Délices, 11 décembre.

La ratification de la capitulation de Stade n’arriva de la cour à M.  le maréchal de Richelieu que le 12 novembre. Les Hanovriens se sont crus en droit de ne la pas tenir, surtout après la belle aventure de l’armée de Soubise. M.  de Linar ne signifia à M.  le maréchal de Richelieu que le 28 la rupture totale. Les Ha-

  1. Éditeurs, de Cayrol et François.