Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome39.djvu/337

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C’est contre un receveur du domaine qu’on plaide ; et les descendants du grand Budée doivent l’emporter sur un receveur, quand ils ont la justice pour eux. Je vous demande, avec la plus tendre instance, de parler à M. de Courteilles avec la plus grande force. Je vous aurai une éternelle obligation.

MM. de Douglas, qui sont joints à MM. Budée[1] de Boisy, vous rendront ce billet.


3486. — À M. D’ALEMBERT.
Aux Délices, 12 décembre.

Vous savez, mon cher philosophe, tous les murmures de la synagogue. M. de Cubières[2] a dû vous en parler. Ces drôles osent se plaindre de l’éloge que vous daignez leur donner, de croire un Dieu, et d’avoir plus de raison que de foi.

Quelques-uns m’accusent d’une confédération impie avec vous. Vous savez mon innocence. Ils disent qu’ils protesteront contre votre article. Laissez-les protester, et moquez-vous d’eux. Ils auront beau jurer qu’ils croient la Trinité ; leurs camarades de Hollande, de Suisse, et d’Allemagne, savent bien qu’il n’en est rien. Ils n’auront que la honte d’avoir renié inutilement leur créance. Mais vous, à qui quelques-uns se sont ouverts, vous qui êtes instruit de leur foi par leur bouche, ne vous rétractez pas : il y va de votre salut, votre conscience y est engagée. Ces gens-là vont se couvrir de ridicule ; chaque démarche qu’ils font depuis le tombeau du diacre Pâris, la place où ils ont assassiné Servet, et jusqu’à celle où ils ont assassiné Jean Hus, les rend tous également l’opprobre du genre humain. Fanatiques papistes, fanatiques calvinistes, tous sont pétris de la même m… détrempée de sang corrompu. Vous n’avez pas besoin de mes saintes exhortations pour soutenir la gale que vous avez donnée au troupeau de Genève. Vous serez ferme, je n’en suis pas en peine ; mais je ne peux m’empêcher de vous parler de leurs criailleries.

À l’égard de Luc[3], tantôt mordant, tantôt mordu, c’est un bien malheureux mortel ; et ceux qui se font tuer pour ces mes-

  1. Un de ces MM. Budée, en 1758, vendit la terre de Ferney à Voltaire. (Cl.)
  2. Au lieu de ce nom, cité dans quelques autres lettres de Voltaire et de d’Alembert, en 1758, je pense qu’on doit lire celui de Lubière. Il y avait alors à Genève un M. de Lubière dont Mme d’Épinai parle dans une lettre du 1er octobre 1760, à Tronchin le conseiller d’État, et auquel elle écrivit au mois de mars 1755. (Cl.)
  3. Le roi de Prusse ; voyez lettre 3380.