Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome42.djvu/294

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sionnément, quoique notre petit pays de Gex soit séparé du reste du monde, cependant je ne vois que des gens enthousiasmés de la paix, et je n’entends que des cris de joie.

Je vous prie de vouloir bien donner à M. le duc de Praslin ces trois mots[1], que je prends la liberté de lui écrire. Il y a soixante et quatre ans qu’un marquis de Praslin, que je peindrais, avait beaucoup de bonté pour moi ; cela m’a été d’un bon augure.

Voici le temps des plaisirs et des spectacles. Il y avait une plaisante dédicace[2] à deux seigneurs de Praslin qu’on devait mettre à la tête du Droit du Seigneur, comédie de Jodelle, du temps de Henri II, rajustée depuis peu au théâtre par un quidam.

Nous avons joué depuis peu le Droit du Seigneur, avec tout le succès possible, à Ferney. Mlle  Corneille a joué Colette supérieurement ; elle avait une cabale contre elle ; la cabale a été forcée de battre des mains.

Je soupçonne que M. de Chauvelin vous a envoyé, de Turin, une fin du troisième acte de Cassandre, et le quatrième tout entier : je ne voulais pas vous envoyer la pièce par morceaux ; j’attendais vos ordres angéliques pour vous faire parvenir la pièce entière ; mais ce que M. de Chauvelin aura fait sera bien fait.

Il y a un conseiller au parlement de Toulouse[3] qui vient, je crois, à Paris, pour rendre justice à l’innocence des Calas, et gloire à la vérité. Il y a de belles âmes ; celle-là sera bien digne de connaître la vôtre.

Je vous embrasse avec les plus tendres respects, et je me mets aux pieds de Mme  d’Argental.


5088. — DE M.  D’ALEMBERT.
À Paris, le 17 novembre.

Vous auriez eu très-grand tort, mon cher et illustre maître, de faire une satire contre un ministre à qui vous avez, dites-vous, de si grandes obligations ; vous auriez même eu tort de l’outrager, quand vous eussiez été intéressé dans la comédie des Philosophes, dont il a procuré et favorisé la représentation. Il ne faut jamais attaquer plus fort que soi. D’ailleurs c’est peine perdue que l’éloge ou la satire d’un homme en place, parce que toutes

  1. La lettre 5086.
  2. Voyez une note sur la lettre 4943.
  3. De Lasalle.