C’était un vilain jour pour moi, monsieur, que celui où j’étais à Ferney quand vous me faisiez l’honneur de venir aux Délices.
Mais c’est un bien beau jour, malgré la bise et la neige, que celui où nous apprenons l’arrêt du conseil et la manière dont le roi a daigné se déclarer contre les dévots fanatiques qui voulaient qu’on abandonnât les Calas. Nous devons beaucoup à M. le duc de Choiseul, et surtout à M. le duc de Praslin.
Le règne de l’humanité s’annonce.
Ce qui augmente ma joie et mes espérances, c’est l’attendrissement universel dans la galerie de Versailles[2].
Voilà bien une occasion où la voix du peuple est la voix de Dieu.
Je parie que vous avez pleuré de joie, en apprenant cet heureux succès.
Je vous demande pardon de vous avoir fait lire mes esquisses informes, mais je crois vous devoir ces prémices, comme un tribut que mon cœur et mon esprit payent aux vôtres,
Monsieur, vous vous êtes couvert de gloire, et vous avez donné de vous la plus haute idée par la manière dont vous avez parlé dans ce nombreux conseil, dont vous avez enlevé les suffrages. Permettez-moi de vous en faire mon compliment, ainsi que mes remerciements. Si vous faites ce petit voyage que vous avez projeté dans nos cantons, moitié catholiques, moitié hérétiques, vous verrez tous les cœurs voler au-devant de vous, et je vous assure que votre arrivée sera un triomphe. Je ne serai pas, monsieur, le moins empressé à vous rendre mes hommages. Les philosophes doivent vous chérir, et les intolérants mêmes doivent vous estimer. Je vous respecte, et je prends la liberté de