Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome43.djvu/284

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

aimaient la comédie, et qu’ils en faisaient. Les jansénistes sont les ennemis de tout plaisir honnête.

Mon cher frère, quoique je sois absorbé dans des in-folio, je n’oublie pourtant pas Corneille. Il y a un jeune auteur qui a fait la Jeune Indienne ; il s’appelle, je crois, M. de Chamfort[1]. Il y a un M. du Clairon, auteur de Cromwell[2]. Il me semble que quiconque travaille pour le théâtre a droit à un Corneille : il faut que les disciples aient notre maître devant les yeux. Je vous supplie donc de vouloir bien avertir Duchesne d’envoyer prendre chez vous deux exemplaires pour ces deux messieurs : vous ferez, je crois, une très-bonne œuvre.

Est-il vrai que monsieur le contrôleur général rembourse quatre millions d’effets royaux ? Cela n’a guère de rapport à Corneille ; mais il faut s’instruire un peu des affaires publiques.

Je ne sais rien de nouveau ; je moissonne mes champs, et quelques vérités éparses dans de mauvais livres : ce sont de vieux arsenaux dans lesquels je trouve des armes rouillées qui ne laisseront pas d’être aiguisées, et dont je tâcherai de me servir avec toute la discrétion possible.

Je gémis toujours de n’être pas aidé par quelqu’un de nos frères ; cela fait saigner le cœur. Vous seul me consolez et m’encouragez.

Je vous embrasse de tout mon cœur. Écr. l’inf…


5711. — À M. LE CONSEILLER TRONCHIN[3].
Juillet.

Mon cher ami, j’ai fait ce que j’ai pu pour avoir un exemplaire de cette misère, et je n’ai pu y parvenir : on dit qu’il n’y en a qu’un ; on disait auparavant qu’il y en avait trois ou quatre. Cette petite manœuvre est un tour de la faction qui a prétendu que c’était à Ferney qu’on avait résolu de condamner Jean-Jacques. Depuis ce temps, presque toutes les remontrances ont roulé en partie sur la sévérité exercée contre Jean-Jacques, et sur le silence observé à mon égard ; mais les factieux auraient pu observer que je suis Français, établi en France et non à Genève. Ce dernier effort de mes ennemis vous paraît sans doute aussi méprisable qu’à moi. Je crois, comme vous, qu’il faut

  1. Voyez page 225.
  2. Voyez page 238.
  3. Éditeurs, de Cayrol et François.