Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome43.djvu/303

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Elle aimait à rendre service, et était en état d’en rendre ; mais mon intérêt n’entre pour rien dans les regrets que je donne à sa perte : ayant renoncé à tout, et n’ayant rien à demander, je n’écoute que mon cœur, et je pleure votre amie sans aucun retour sur moi-même.

Si vous êtes à Colmar, madame, je vous prie de faire souvenir de moi monsieur le premier président votre frère. Je serai peut-être obligé, malgré ma mauvaise santé et ma faiblesse, de faire un tour dans votre Alsace pour quelques arrangements que j’ai à prendre avec M. le duc de Wurtemberg ; mais alors il ne sera que le prétexte, et vous serez la véritable raison, de mon voyage. Vous ne sauriez croire quel plaisir j’aurais à m’entretenir avec vous ; nous parlerions du moins du passé pour nous consoler du présent. C’est la ressource des anciens amis. Regardons l’avenir en philosophes, jouissons avec tranquillité du peu de temps qui nous reste. Puissé-je venir philosopher avec vous au Jard ! je ne vous dirais jamais assez combien je vous suis attaché ; je croirais renaître en vous faisant ma cour. Je maudis mille fois l’éloignement des Alpes au Rhin. Adieu, madame ; portez-vous bien, et conservez-moi des bontés qui font la consolation de ma vie.


5734. — À M.  VERNES[1].
Ferney, 6 auguste.

Mon cher prêtre de Baal, Olympie est tout à fait de votre ressort. Il me semble que l’hiérophante est un honnête homme, qui pense à peu près comme vous, et qui est fort tolérant. Au reste, chacun peut à son gré jeter Olympie dans le feu ou la sauver ; et moi, qui suis très-tolérant, je trouve très-bon que chacun se réjouisse à sa mode.

Ce n’est point dans le temple qu’Olympie se brûle, mais dans la place qui est au devant du temple. La fumée gâterait les belles voûtes du sanctuaire. Il est vrai que cela est assez difficile à exécuter par des décorateurs ordinaires.

Je vous prie de vouloir bien assurer de mon estime, de ma reconnaissance et de mes respects, les traducteurs.

L’affaire des Calas va bien et ira très-bien ; on aura justice entière, mais on ne l’aura pas en un jour. Il est plus aisé de rouer un pauvre homme que de condamner un parlement.

  1. Éditeurs, de Cayrol et François.