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5803. — À M. COLINI.
Ferney, 27 octobre.

Mon cher ami, j’étais tout prêt à partir, j’allais venir en poste vous embrasser, me mettre aux pieds de Leurs Altesses électorales, et passer avec elles le reste de l’automne. Mes maux, et surtout ma fluxion sur les yeux, ont tellement redoublé que je suis actuellement privé de la vue, et que tout ce que je peux faire, c’est de signer mon nom au hasard. Me voilà entre quatre rideaux : ma vieillesse est devenue bien malheureuse. Je perds avec ma santé plus d’une consolation de ma vie ; mais si les bontés de monseigneur l’électeur me restent, je ne me croirai point à plaindre.

Avez-vous entendu parler d’un Dictionnaire philosophique portatif qu’on débite en Hollande ? Je me le suis fait lire : il est détestablement imprimé, et plein de fautes absurdes ; mais il y a des choses très-singulières et très-intéressantes. C’est un recueil de pièces de plusieurs auteurs. On en a déterré quelques-unes de moi, qui ne sont pas les meilleures. Le reste est fort bon. Adieu ; je vous embrasse de tout mon cœur.


5804. — À M. BORDES[1].
Aux Délices, 27 octobre.

Puisque vous nous avez promis, monsieur, de nous confier votre comédie, vous tiendrez votre promesse. N’allez pas manquer de parole par excès de modestie. Il me paraît impossible qu’avec l’esprit que vous avez vous n’ayez pas fait une très-bonne pièce ; j’ai vu de vous des choses charmantes dans plus d’un genre. Nous vous promettrons le secret, et nous remplirons, Mme Denis et moi, toutes les conditions que vous nous imposerez.

Je vous assure sur mon honneur que le Dictionnaire philosophique est de plusieurs mains. L’article Apocalypse est de M. Abauzit, de Genève, vieillard de quatre-vingts ans, qui a un grand mérite et une science immense.

L’article Messie est du premier pasteur de Lausanne ; ce morceau me parait savant et bien fait. Il était destiné pour l’Encyclopédie, peut-être même l’y trouverons-nous imprimé.

  1. Éditeurs, de Cayrol et François.