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5847. — À M.  DAMILAVILLE.
15 décembre.

Frère Cramer est d’raccord, mon cher frère : ainsi envoyez au plus tôt l’histoire de MM. de Loyola[1] ; mais n’oubliez pas de me parler des nouveaux édits. Tous mes correspondants me mandent d’ordinaire, quand il s’agit d’une chose bien intéressante : « Je ne vous la mande pas, car vous la savez. » Gardez-vous bien de les imiter ; dites-moi tout, car je ne sais rien. On parle de la suppression de tous les receveurs et contrôleurs du dixième. Je crois encore[2] que cela ne vous regarde pas, et que votre emploi est à l’abri d’un nouveau règlement. Je vous prie de m’en instruire ; je suis un vrai frère, je m’intéresse à vous spirituellement et temporellement.

Je crois que, dans le moment présent, on ne s’intéresse guère aux rêveries du Testament élu cardinal de Richelieu. Les sottises présentes occupent toujours tout le monde, et les sottises passées n’amusent qu’un très-petit nombre de gens oisifs.

Les nouveaux édits retarderont probablement le beau morceau d’éloquence qu’Omer prépare ; s’il est encore aidé par Chaumeix, cela sera divin. Continuez à échauffer le génie de Protagoras : Dieu le destine sans doute à un grand apostolat ; il faut qu’il écrase le monstre. N’est-ce pas une chose honteuse qu’on ait tant reproché aux philosophes de s’unir pour faire triompher la raison, et qu’aucun d’eux n’écrive en sa faveur ? Il faudrait au moins qu’ils méritassent les reproches qu’on leur fait. Mourrai-je sans avoir vu les derniers coups portés à l’hydre abbominable qui empeste et qui tue ?

Je vous embrasse bien tendrement. Écr. l’inf…


5848. — À MADAME LA MARQUISE DE BOUFFLERS[3].
Ferney, 15 décembre.

J’ai l’honneur, madame, d’avoir actuellement dans mon taudis le peintre que vous protégez. Vous avez bien raison d’aimer

  1. Sur la Destruction des jésuites par d’Alembert.
  2. Voyez page 346.
  3. Voyez tome XXXVII, page 45. — Cette lettre, imprimée en 1820 dans le