sous mon nom, dans les pays étrangers, des écrits auxquels je n’ai pas la moindre part. J’ignore si je dois cet honneur à la malignité d’un éditeur, ou à l’intérêt très-mal entendu d’un libraire. Tout ce que je puis déclarer, c’est que je regarde comme des faussaires[1] tous ceux qui se servent ainsi d’un nom connu pour débiter des livres qui ne sont pas faits pour l’être. N’étant pas à portée de réprimer une pareille licence, je puis et je dois au moins m’en plaindre, et je m’adresse à vous, messieurs, comme à des hommes à qui l’honneur de la littérature doit être plus cher qu’à personne.
J’ai l’honneur d’être, etc.
Quelque mépris qu’on ait pour la calomnie, il est quelquefois nécessaire de la réfuter. Un libraire d’Amsterdam a cru qu’il était de son intérêt d’imprimer sous mon nom des bêtises hardies[3]. Il a débité une brochure intitulée Ouvrage posthume de M. de M. Y ; le Testament de Jean Meslier, autre brochure, etc. ; et il a donné à ce petit recueil le titre de Collection complète des ouvrages de M. de V. Comment un si petit livre peut-il être intitulé Collection complète, et comment une œuvre posthume de M. Y, et un testament d’un homme mort il y a trente ans, peuvent-ils être de moi ? Je ferai encore une autre question : Comment ne punit-on pas un tel délit, qui est celui d’un calomniateur et d’un faussaire ? Un autre libraire s’est avisé d’imprimer l’Arètin[4] sous mon nom. Un autre donne mes prétendues Lettres secrètes ; mais, mon ami, si elles sont secrètes, elles ne doivent donc pas être publiques.
- ↑ C’est peut-être cette phrase et la lettre dont elle fait partie qui sont rappelées dans la note suivante, insérée dans le Journal encyclopédique du 15 janvier
1765, page 191 :
« L’abus qu’on fait du nom de M. de Voltaire, en le plaçant à la tête de certains ouvrages impies et scandaleux auxquels il n’a pas la moindre part, oblige ce célèbre auteur à faire déclarer publiquement qu’il « n’a aucune correspondance avec aucun libraire de l’Europe ; que quiconque se sert de son nom est un faussaire ; et qu’il s’en remet aux magistrats pour punir un tel brigandage. »
- ↑ Cette lettre a été imprimée dans le Journal encyclopédique, 1765, janvier, II, 145-146 ; et dans le Mercure, 1765, janvier, II, 125-126.
- ↑ Voyez la note 3, page 384.
- ↑ L’Arétin parut pour la première fois en 1763, in-12. Il a été réimprimé plusieurs fois sous le titre de l’Arétin moderne. Je n’ai point vu l’édition avec le nom de Voltaire. L’auteur est l’abbé Dulaurens, auteur du Compère Matthieu, etc. ; né en 1719, mort en 1797.