Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome43.djvu/500

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Adieu, mon cher frère ; vous êtes un homme selon mon cœur ; votre zèle est égal à votre raison ; je hais les tièdes. Écr. l’inf…, écr. l’inf…, vous dis-je. Je vous embrasse de toutes mes pauvres forces.


5942. — À M. LE COMTE D’ARGENTAL.
15 mars.

Oui, sans doute, mon ange adorable, j’ai été infiniment touché du Mémoire du jeune Lavaysse[1], de sa simplicité attendrissante, et de cette vérité sans ostentation qui n’appartient qu’à la vertu. Je vous demande en grâce de m’envoyer l’arrêt dès qu’il sera prononcé.

Vous savez que ce David[2], auteur de tout cet affreux désastre, était un très-malhonnête homme ; le fripon a fait rouer l’innocent ; le voilà bien reconnu ; il a été destitué de sa place. J’espère qu’il payera chèrement le sang de Calas.

C’est une étrange fatalité qu’il se trouve en même temps deux affaires pareilles. Je sais que la plupart des calvinistes de Languedoc sont de grands fous ; mais ils sont fous persécutés, et les catholiques de ce pays-là sont fous persécuteurs.

J’ai envoyé à M. Damilaville le détail de cette seconde aventure, qu’il doit vous communiquer[3]. Il y a des malheurs bien épouvantables dans ce meilleur des mondes possibles.

Je suppose, mon cher ange, que vous avez reçu ma lettre à M. Berger[4], dont j’ignore la demeure, comme j’ignorais son existence. Je vous demande bien pardon de vous avoir importuné d’une lettre pour un homme qui est à la fois indiscret et dévot.

J’ai vu votre Suédois ; il retourne à Paris, et s’est chargé d’un paquet pour vous. Le Genevois, qui est chargé d’un autre, doit être déjà parti. Je vous supplierai de donner à frère Damilaville les brochures dont vous ne voudrez pas. Je crois qu’il y en a seize, cela fait seize pains bénits pour les fidèles. Songez, je vous en prie, combien la superstition a fait périr de Calas depuis plus de quatorze cents années. Est-il possible que ce monstre ait encore des partisans ? Mon horreur pour lui augmente tous les

  1. Voyez le n° ix de la note, tome XXIV, page 366.
  2. Capitoul de Toulouse ; voyez tome XXV, page 21.
  3. La lettre du 1er mars, n° 5929.
  4. La lettre 5923.