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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome48.djvu/181

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année 1772.

8626. — À M. HENNIN.
À Ferney, 13 septembre.

Je vous renvoie, monsieur, avec mille remerciements, la Relation de Stockholm[1]. On m’en a envoyé de Versailles un exemplaire que je conserverai toute ma vie, comme un monument de la plus noble fermeté et de la plus haute sagesse.

Il n’en sera pas de même de la Lettre de cet abbé Pinzo[2]. Je ne sais si cet extravagant est à Paris. Il n’est pas vraisemblable qu’un Italien ait écrit une telle lettre en français. Ce qui est bien sûr, c’est qu’une telle lettre est l’abominable production d’un fou furieux qui doit être enchaîné ; c’est d’ailleurs une plate imitation des Vous et des Tu[3].

J’ignore s’il y a en Savoie quelque barbare assez sot pour avoir envoyé cette lettre au pape, et assez dépourvu de sens et de goût pour me l’imputer ; mais je suis sûr que le pape a trop d’esprit pour me croire capable d’une si horrible platitude. Il y a des calomnies qui sont dangereuses quand elles sont faites avec art ; mais les impostures absurdes ne réussissent jamais. Il faut en tout pays laisser parler la canaille ; il vaudrait mieux qu’elle ne parlât pas, mais on ne peut lui arracher la langue.

On débite à Paris des sottises plus étranges. J’en ai reçu par la poste. Il en faut toujours revenir au mot du cardinal Mazarin : Laissons-les dire, et qu’ils nous laissent faire.

Mes très-humbles respects.

8627. — À M. D’ALEMBERT.
16 septembre.

Mon cher philosophe, ce siècle-ci ne vous paraît-il pas celui des révolutions, à commencer par les jésuites, et à finir par la Suède, et peut-être à ne point finir ? Voici une révolution qui m’arrive à moi. Vous avez sans doute entendu parler d’un abbé Pinzo, qui a écrit ou laissé écrire sous son nom une lettre à la Jean-Jacques, prodigieusement folle et insolente. On a imprimé cette lettre l’imprimeur s’est servi de mon orthographe ; les

  1. Voyez la note, page 169.
  2. Voyez une note sur la lettre 8219.
  3. Voyez tome X, page 269 ; les tu et les vous sont alternativement employés dans la Lettre de l’abbé Pinzo.