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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome48.djvu/219

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année 1772.

8669. — À M. MARMONTEL.
4 novembre.

Je vous envoie, mon cher ami, cette Épître à Horace[1], tout informe qu’elle est : elle sera pour vous et pour nos amis. Je suis forcé de la laisser courir, parce que je sais qu’on en a dans Paris des copies très-incorrectes. Je tire du moins de ce petit malheur un très-grand avantage, en vous soumettant cette esquisse. Les ennemis d’Horace et les jansénistes crieront ; peu de gens seront contents. La seule chose qui me console, c’est que la fin de l’Épitre est si insolente qu’on ne l’imprimera pas.

J’ai lu Roméo[2] : je sais qu’il a réussi au théâtre, et que Cléopâtre[3] est tombée ; mais je vous avertis qu’il y a trente morceaux dans votre Cléopâtre qui valent mieux que trente pièces qui ont eu du succès. Il me semble que le public ne sait plus où il en est. J’avouerai que je ne sais plus où j’en suis. Il est trop ridicule de faire de ces pauvretés-là à mon âge ; j’en rougis : c’est barbouiller le buste que vous et la grande prêtresse[4] avez si merveilleusement décoré.

La copie que je vous envoie est aussi pour M. d’Alembert. N’a-t-il pas un copiste ?

8670. — À MADAME LA MARQUISE DU DEFFANT.
4 novembre.

L’Épître à Horace, encore une fois, n’est pas achevée, madame ; et cependant je vous l’envoie, et, qui plus est, je vous l’envoie avec des notes. Soyez très-sûre que ce n’est pas de moi que Mme la comtesse de Brionne la tient ; mais voici le fait.

Mon âge et mes maux me mettent très-souvent hors d’état d’écrire. J’ai dicté ce croquis à M. Durey, beau-frère de monsieur le premier président du parlement de Paris[5], qui a été huit mois chez moi.

On ne se fait nul scrupule d’une infidélité en vers. Pour celles qu’on fait en prose dans votre pays, je ne vous en parle

  1. Tome X, page 441.
  2. Roméo et Juliette, tragédie de Ducis ; voyez lettre 8619.
  3. Cléopâtre, tragédie de Marmontel, jouée en 1750.
  4. Voyez lettre 8656.
  5. Berthier de Sauvigny, intendant de Paris, avait été, le 13 avril 1771, nommé premier président du parlement de Paris de la formation de Maupeou.