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176 DISSERTATION

(le son manteau ; Electre, dis-je, est épargnée. Sophocle certainement l’emporte ici sur Euripide ; mais les Dioscures, Castor et PoHux, frères de Clytemnestre, surviennent, et loin de prendre la défense de leur sœur, ils rejettent le crime de ses enfants sur Apollon, envoient Oreste à Athènes pour V être expié, lui prédisent qu’il courra risque d’être condamné à mort, mais qu’Apollon le sauvera, en se chargeant lui-même de ce parricide. Ils lui annoncent ensuite un sort heureux, après qu’Electre aura épousé Pylade ; époux digne en effet d’une aussi grande princesse, puisqu’il était fils d’une sœur d’Agamemnon, et qu’il descendait d’Éaque, fils de Jupiter et d’Égine. C’est ce qui justifie le reproche d’un critique à ! M. Racine, d’avoir fait de Pvlade un confident trop subalterne dans Atidr otnn que, et (Y cwolr déshonore par là une amitié respectable entre deux princes dont la naissance était égale.

Quant à la pièce d’Eschyle, des filles étrangères, esclaves de Glytemnestre,

  • mais attachées à Éleclre, portent des présents sur le tombeau d’Agamemnon :

c’est ce qui a fait donner à la pièce le nom de Choéphores, ou porteuses de libations ou de présents, du mot grec /.or, qui signifie des libations qu’on faisait sur les tombeaux.

Oreste est reconnu par sa sœur dès le commencement de la pièce, par trois marques assez équivoques, les cheveux, la trace des pas, et larobe ûcpaaaa qu’elle a tissue elle-même, il y avait sans doute longtemps.

Les anciens eux-mêmes se sont moqués de cette reconnaissance ; et M. Dacier la blâme, parce qu’elle est trop éloignée de la péripétie, ou changement d’état. Celle de Sophocle est plus simple. Oreste dit à sa sœur : « Regardez cet anneau, c’est celui de mon père. »

Il déclare ensuite que l’oracle d’.^pollon lui a ordonné de tuer les meurtriers de son père, sous peine d’éprouver les plus cruels tourments, d’être livré aux furies, etc.

Le P. Brumoy regarde judicieusement à ce sujet qu’Oreste est criminel en obéissant et en n’obéissant pas. Cependant il ne peut se déterminer à tuer sa mère. Electre lève ses scrupules, et l’aigrit contre elle. Le chœur lui raconte le songe de la reine, qui a cru voir sortir de son sein un serpent qui lui a tiré du sang au lieu de lait. Oreste jure qu’il accomplira ce songe. Le chœur suivant est un récit des amours funestes qui ont été ensanglantées.

Oreste s’introduit dans le palais d’Égisthe sous le nom d’un marchand de la Phocide, qui vient annoncer la mort du fils d’Agamemnon. Égisthe entre dans son palais pour s’assurer de ce bruit. Oreste l’y tue, et reparaît pour assassiner sa mère sur le théâtre.

En vain elle lui demande grâce par les mamelles qui l’ont allaité. Pylade dit à son ami, qui craint encore de commettre ce parricide, qu’il doit obéir aux dieux et accomplir ses serments : « Préférez-vous, ajoute-t-il, vos