Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome5.djvu/263

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Ainsi d’un scélérat un héros est l’appui !
Agissez-vous pour vous, en nous parlant pour lui ?
César, vous m’entendez ; et Rome trop à plaindre
N’aura donc désormais que ses enfants à craindre ?

CLODIUS

Rome est en sûreté ; César est citoyen.
Qui peut avoir ici d’autre avis que le sien ?

CICERON

Clodius, achevez : que votre main seconde
La main qui prépara la ruine du monde.
C’en est trop, je ne vois dans ces murs menacés
Que conjurés ardents et citoyens glacés.
Catilina l’emporte, et sa tranquille rage,
Sans crainte et sans danger, médite le carnage.
Au rang des sénateurs il est encore admis ;
Il proscrit le sénat, et s’y fait des amis ;
Il dévore des yeux le fruit de tous ses crimes :
I1 vous voit, vous menace, et marque ses victimes :
Et lorsque je m’oppose à tant d’énormités,
César parle de droits et de formalités ;
Clodius à mes yeux de son parti se range ;
Aucun ne veut souffrir que Cicéron le venge.
Nonnius par ce traître est mort assassiné.
N’avons-nous pas sur lui le droit qu’il s’est donné ?
Le devoir le plus saint, la loi la plus chérie,
Est d’oublier la loi pour sauver la patrie.
Mais vous n’en avez plus.



Scène 5

Le sénat, Aurélie


AURELIE

O vous ! sacrés vengeurs,
Demi-dieux sur la terre, et mes seuls protecteurs,
Consul, auguste appui qu’implore l’innocence,
Mon père par ma voix vous demande vengeance :
J’ai retiré ce fer enfoncé dans son flanc.
(en voulant se jeter aux pieds de Cicéron qui la relève)
Mes pleurs mouillent vos pieds arrosés de son sang.