Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome5.djvu/379

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SOCRATE.

Je ne puis regarder les choses comme faites que quand elles le sont.


Scène IV.

Anitus, Socrate, Aglaé.
SOCRATE.

Venez, belle Aglaé, venez décider de votre sort. Voilà un monseigneur, prêtre d’un haut rang, le premier prêtre d’Athènes, qui s’offre pour être votre époux. Je vous laisse toute la liberté de vous expliquer avec lui. Cette liberté serait gênée par ma présence. Quelque choix que vous fassiez, je l’approuve. Xantippe préparera tout pour vos noces.

Il sort.
AGLAÉ.

Ah ! Généreux Socrate, c’est avec bien du regret que je vous vois partir.

ANITUS.

Il paraît, aimable Aglaé, que vous avez une grande confiance dans le bon Socrate.

AGLAÉ.

Je le dois : il me sert de père, et il forme mon âme.

ANITUS.

Eh bien ! S’il dirige vos sentiments, pourriez-vous me dire ce que vous pensez de Cérès, de Cybèle, de Vénus ?

AGLAÉ.

Hélas ! J’en penserai tout ce que vous voudrez.

ANITUS.

C’est bien dit : vous ferez aussi tout ce que je voudrai.

AGLAÉ.

Non : l’un est fort différent de l’autre.

ANITUS.

Vous voyez que le sage Socrate consent à notre union ; Xantippe, sa femme, presse ce mariage. Vous savez quels sentiments vous m’avez inspirés. Vous connaissez mon rang et mon crédit ; vous voyez que mon bonheur, et peut-être le vôtre, ne dépendent que d’un mot de votre bouche.

AGLAÉ.

Je vais vous répondre avec la vérité que ce grand homme qui sort d’ici m’a instruite à ne dissimuler jamais, et avec la liberté