Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome5.djvu/466

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LE MESSAGER.

Votre personne et rien, c’est la même chose ; votre maison ne vous appartient peut-être pas ; votre bien, où est-il ? Il faut de l’argent.

FABRICE.

Mon bon monsieur Freeport, donnerai-je les cinq cents guinées que je garde, et qu’elle a refusées aussi noblement que vous les avez offertes ?

FREEPORT.

Belle demande ! apparemment… Monsieur le messager, je dépose cinq cents guinées, mille, deux mille, s’il le faut ; voilà comme je suis fait. Je m’appelle Freeport. Je réponds de la vertu de la fille… autant que je peux… mais il ne faudrait pas qu’elle fût si fière.

LE MESSAGER.

Venez, monsieur, faire votre soumission.

FREEPORT.

Très-volontiers, très-volontiers.

FABRICE.

Tout le monde ne place pas ainsi son argent.

FREEPORT.

En l’employant à faire du bien, c’est le placer au plus haut intérêt.

(Freeport et le messager vont compter de l’argent, et écrire au fond du café.)


Scène V.


MONROSE, FABRICE.

FABRICE.

Monsieur, vous êtes étonné peut-être du procédé de M. Freeport, mais c’est sa façon. Heureux ceux qu’il prend tout d’un coup en amitié ! Il n’est pas complimenteur, mais il oblige en moins de temps que les autres ne font des protestations de services.

MONROSE.

Il y a de belles âmes… Que deviendrai-je ?

FABRICE.

Gardons-nous au moins de dire à notre pauvre petite le danger qu’elle a couru.

MONROSE.

Allons, partons cette nuit même.