Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome5.djvu/469

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MONROSE.

Ah ! c’est pour cela même que je veux la voir.

POLLY.

De nouveaux chagrins qui l’ont accablée, qui ont déchiré son cœur, lui ont fait perdre l’usage de ses sens. Elle est à peine revenue à elle, et le peu de repos qu’elle goûte dans ce moment est un repos mêlé de trouble et d’amertume : de grâce, monsieur, ménagez sa faiblesse et ses douleurs.

MONROSE.

Tout ce que vous me dites redouble mon empressement. Je suis son compatriote ; je partage toutes ses afflictions ; je les diminuerai peut-être : souffrez qu’avant de quitter cette ville, je puisse entretenir votre maîtresse.

POLLY.

Mon cher compatriote, vous m’attendrissez : attendez encore quelques moments. Je vais à elle : je reviendrai à vous.



Scène VIII.


MONROSE, FABRICE.

FABRICE, le tirant par la manche.

Monsieur, n’y a-t-il personne là ?

MONROSE.

Que j’attends son retour avec des mouvements d’impatience et de trouble !

FABRICE.

Ne nous écoute-t-on point ?

MONROSE.

Mon cœur ne peut suffire à tout ce qu’il éprouve.

FABRICE.

On vous cherche…

MONROSE, se tournant.

Qui ? quoi ? comment ? pourquoi ? que voulez-vous dire ?

FABRICE.

On vous cherche, monsieur. Je m’intéresse à ceux qui logent chez moi. Je ne sais qui vous êtes : mais on est venu me demander qui vous étiez : on rôde autour de la maison, on s’informe, on entre, on passe, on repasse, on guette, et je ne serai point surpris si, dans peu, on vous fait le même compliment qu’à cette jeune et chère demoiselle, qui est, dit-on, de votre pays.